Ce n’est pas encore le grand soir fiscal mais après des années à considérer l’impôt comme l’ennemi de la réussite économique, c’est un pas notable. Dans une interview au Parisien lundi 23 septembre, le patron du Medef Patrick Martin s’est ainsi dit «prêt à discuter» d’une hausse d’impôts des entreprises, mais sous condition. «Nous sommes prêts à discuter d’une hausse d’impôts des entreprises à deux conditions. D’abord, si nous avons la démonstration que sur l’excès de dépenses publiques, l’Etat fait des efforts bien supérieurs à ce qu’il demande aux entreprises. Ensuite, que l’effort demandé n’enraye pas la dynamique d’investissement et de création d’emplois dans une conjoncture économique très fragile.»
«Nous sommes dans une attitude constructive à l’égard de ce gouvernement», a assuré le dirigeant, «car nous sommes conscients que la situation des finances publiques est très grave et l’équation politique fragile». Et d’appeler tout de même le gouvernement à la retenue : «Les entreprises françaises supportent le niveau de prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux le plus élevé au monde, 364 milliards d’euros par an». Il a aussi remarqué «qu’il y a déjà beaucoup de taxes et impôts qui touchent plus les grandes entreprises», et «qu’il ne faut pas trop tirer sur la corde».
Finances
Dans ses concessions, Patrick Martin estime toutefois qu’on «peut parler» de taxer les rachats d’actions, comme le précédent gouvernement l’envisageait, mais qu’il vaudrait mieux «encourager leurs investissements profitables». Il a évoqué aussi le risque de «faire fuir» les investisseurs étrangers avec cette mesure.
Une prise de position qui intervient alors que la question a été au cœur des rapports de force pour former le nouveau gouvernement. Si le nouveau Premier ministre Michel Barnier s’y était dit favorable, il avait été aussitôt menacé par les troupes macronistes, opposées à toute hausse fiscale, du retrait de leur soutien. Cela n’a pas empêché le chef du gouvernement de former son équipe, avec des macronistes, et d’annoncer un début de couleur dimanche soir lors de son interview sur France 2 : sans vouloir «alourdir encore l’impôt sur l’ensemble des Français […], ni sur les gens les plus modestes, ni sur les gens qui travaillent, ni sur les classes moyennes» il envisageait d’exiger un effort de la part des «personnes les plus fortunées» et de «certaines grandes entreprises». En l’espèce, l’ancien négociateur du Brexit avait même refusé d’exclure une hausse de l’impôt sur les sociétés, abaissé de 33 % à 25 % par Emmanuel Macron.