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Libération
Epilogue

Le tribunal de commerce de Paris valide le sauvetage de Casino

En validant la reprise de Casino par les milliardaires Daniel Kretinsky, Marc Ladreit de Lacharrière et le fonds d’investissement Attestor ce lundi 26 février, le tribunal permet au groupe d’envisager son redressement, sans certitude sur l’avenir des emplois.
Une superette Casino à Hyères, en 2023. (Magali Cohen/Hans Lucas.AFP)
publié le 26 février 2024 à 16h53

Un mélange de soulagement et d’appréhension. Le tribunal de commerce de Paris a rendu ce lundi 26 février une décision favorable au plan de sauvetage du distributeur Casino, en grande difficulté financière. Le «consortium» de repreneurs composé des milliardaires Daniel Kretinsky (créancier de Libération) et Marc Ladreit de Lacharrière, adossés au fonds d’investissement britannique Attestor s’est dit «réjoui de la décision» dans un communiqué envoyé à la presse.

Un aval qui intervient après des mois d’intenses et âpres négociations menées par la direction du groupe avec ses créanciers et les candidats à sa reprise. Le consortium devrait désormais mettre en place sa stratégie, consistant à privilégier les magasins de proximité rentables aux supermarchés et hypermarchés, majoritairement cédés à la concurrence. Dans le communiqué du groupe, Daniel Kretinsky souhaite désormais passer à la suite : «après des semaines si incertaines, où la menace était de disparaître, le moment va maintenant venir de redonner des moyens et par là même du souffle au Groupe Casino, redimensionné, réorganisé et désendetté. Et ainsi de bâtir un avenir pour ces belles enseignes françaises et leurs salariés compétents et motivés. Le chemin sera encore long, avec des moments difficiles et requerra beaucoup d’efforts de tous, mais je ne doute pas du succès de notre mission.»

Ainsi, les 1 100 magasins Franprix, les 800 Monoprix (qui comptent à eux seuls 20 000 salariés) et les 6 000 Spar, Vival ou Petit Casino, tous au cœur de la stratégie du consortium, devraient bénéficier d’un important développement dans les années à venir, même si cela se fait au détriment d’un certain nombre de ses travailleurs de la grande distribution. Sur les 50 000 salariés que comptait Casino en France fin 2022 dont 1 800 au seul siège social historique de Saint-Étienne 16 000 d’entre eux vont ainsi changer d’enseigne. Selon les syndicats, 6 000 emplois seraient également menacés par le plan de sauvegarde.

A court terme, la décision du tribunal doit permettre aux repreneurs de commencer la restructuration de la dette du groupe et de relancer son activité. Le trio doit ainsi apporter d’apporter une large partie (925 millions d’euros) de l’argent frais (1,2 milliard d’euros) injecté dans Casino pour faire face aux échéances commerciales. En échange, un écrasement de dette très significatif, avec l’effacement de 4,7 milliards d’euros. En juillet 2023, les créances de Casino s’élevaient à 7,6 milliards d’euros.

Date butoir

Ensuite, leur prise de contrôle du groupe doit se concrétiser avant le mois avril, avec une montée au capital de Casino en mars. Dans la foulée, une assemblée générale des nouveaux actionnaires doit statuer sur la nouvelle composition du conseil d’administration. Dans son communiqué, le consortium annonce qu’à partir «du mois d’avril, l’équipe de direction, emmenée par son directeur général Philippe Palazzi, mettra en œuvre un plan ambitieux de réorganisation, d’investissement et de modernisation pour asseoir le développement des enseignes du Groupe.»

La date de rendu de cette décision, ce lundi 26 février, correspond également au dernier jour avant la fin de la «période de sauvegarde accélérée», date limite pour valider le plan de sauvetage du groupe. Le 12 février, lors de l’audience publique, le juge-commissaire avait estimé qu’un refus du tribunal du plan de sauvegarde accéléré pourrait placer Casino dans «une situation économique catastrophique». Casino n’avait donc pas d’alternative que la reprise par le trio Kretinsky-Ladreit de Lacharrière-Attestor, l’autre option semblant être la liquidation judiciaire. Cette validation par le tribunal prenait donc la forme d’une nécessité vitale pour l’avenir du groupe.

Pourtant, le 12 février, lors de l’audience publique, les représentants des salariés ainsi que le procureur avaient rendu des avis défavorables sur ce plan de sauvetage, en dépit de l’absence d’alternative. Les premiers pointaient «l’insuffisance de son volet social» et l’absence de garantie pour les emplois, le second soulignait le manque de transparence des repreneurs, regrettant notamment une «trop grande disparité entre le plan présenté initialement» et celui sur lequel le tribunal doit se prononcer, ainsi que «le contenu parfaitement lacunaire du volet social».

Plusieurs centaines de magasins cédés

Les repreneurs de Casino avaient en effet fait évoluer leur stratégie après l’annonce le 26 octobre 2023 de l’ouverture par le tribunal de la procédure de sauvegarde accélérée et de la réduction des perspectives économiques du groupe. Après avoir déjà cédé 119 supermarchés et hypermarchés à Intermarché, le distributeur stéphanois déclarait vouloir se séparer de près de 400 magasins.

Des annonces concrétisées le 4 janvier, le groupe Casino annonçant la cession de 313 magasins dans le cadre de la restructuration de sa dette, avant d’acter le 24 janvier la vente de 288 d’entre eux à ses concurrents Auchan et Intermarché, en trois vagues successives, au 30 avril, 31 mai et 1er juillet. Une vente qui doit rapporter 1,3 milliard d’euros. Le siège social de Saint-Etienne devrait être conservé, ont assuré à Libé les représentants des repreneurs.

A 9 heures ce lundi 26 février, pour l’ouverture de la Bourse de Paris, l’action de Casino ne valait plus que 42 centimes d’euro, contre 16,30 euros pour le groupe Carrefour.