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Les agences Moody’s et Fitch maintiennent la note de la France

Les deux agences de notation ont annoncé, vendredi 26 avril, qu’elles maintenaient la note souveraine de la France dans un contexte de difficultés budgétaires. Elles se montrent toutefois perplexes devant les objectifs nationaux de rétablissement des comptes publics.
Si les agences de notation examinent le cas français chaque semestre, leurs choix de ce printemps sont particulièrement scrutés. (Jean-Marc Barrere/Hans Lucas.AFP)
publié le 26 avril 2024 à 23h20

Le verdict est tombé. Deux des trois plus grandes agences de notation mondiales ont rendu vendredi soir leur décision à propos de la France ce vendredi soir. Fitch, qui a déjà dégradé la note souveraine en avril 2023 en l’abaissant d’un cran, a décidé de la maintenir à son niveau. Sa concurrente Moody’s n’a pas davantage changé sa précédente notation.

Un déficit à 2,9% «improbable»

Ce n’est donc pas – encore – l’heure de la grande sanction, mais les commentaires qui accompagnent leurs décisions sont sceptiques, alors que le gouvernement prévoit un déficit public à 5,1 % du produit intérieur brut cette année et que la dette était de 110,6 % du PIB à la fin 2023. Les deux agences expriment l’une et l’autre leurs doutes sur le réalisme des objectifs du gouvernement en matière de réduction des finances publiques. Ramener le déficit à 2,9% du PIB en 2027 est jugé «improbable» par Moody’s, tandis que pour Fitch, «cela sera difficile d’atteindre cette cible alors que les mesures de réduction du déficit restent encore largement indéterminées. La France n’a respecté le critère des 3% que quatre fois ces vingt dernières années.»

«Je prends note de la décision des agences Fitch et Moody’s de maintenir inchangée la notation de la dette souveraine de la France», a immédiatement réagi Bruno Le Maire dans un communiqué. «Cette décision doit nous inviter à redoubler de détermination pour rétablir nos finances publiques et tenir l’objectif fixé par le président de la République : être sous les 3% de déficit en 2027», a poursuivi le locataire de Bercy.

«Pas changement des agences de notation Fitch et Moody’s. Cela n’a aucune importance. L’inverse eut été vraie aussi, a commenté de son côté le président de la commission des finances, le député LFI Eric Coquerel. Cela n’empêche pas la politique budgétaire et économique du gouvernement de nous emmener dans le mur.

En attendant Standard and Poor’s

Si elles examinent le cas français chaque semestre, leurs choix de ce printemps sont particulièrement scrutés. Depuis quelques semaines, le gouvernement enchaîne les déconvenues sur les comptes publics du pays. Le déficit public bien plus creusé que prévu l’an dernier, à 5,5 % du produit intérieur brut (PIB) au lieu des 4,9 % prévus, principalement à cause de moindres recettes, ainsi qu’une prévision de croissance très optimiste pour cette année qui a été revue à la baisse, ont contraint le gouvernement à revoir sa trajectoire de rétablissement des finances publiques. Il a dû annoncer 20 milliards d’euros d’économies supplémentaires à réaliser dès cette année. La nouvelle copie du programme de stabilité, présentée le 17 avril en Conseil des ministres avant d’être transmise à Bruxelles prévoit de ramener le déficit sous les 3 % en 2027, au prix d’autres coupes très importantes (l’exécutif se refusant à utiliser massivement la fiscalité). Bercy a beau assurer que ces objectifs sont «ambitieux mais crédibles», le Haut Conseil des finances publiques, qui s’est penché sur le sujet avant les agences de notation, a jugé la semaine dernière que cette trajectoire manquait de «crédibilité» et de «cohérence». Par ailleurs, la probabilité que la Commission européenne ouvre une procédure de déficit excessif au lendemain des élections européennes se renforce.

Après Moody’s et Fitch, la troisième, Standard & Poor’s rendra sa note le 31 mai, et cette échéance est, elle aussi, redoutée par le gouvernement, d’autant qu’elle intervient dix jours avant les élections européennes. Même si les cabinets ministériels se rassurent en constatant que le «spread» avec l’Allemagne – soit l’écart de taux d’emprunt à dix ans entre les deux pays – ne s’agrandit pas. Ce qui signifie que les investisseurs restent confiants. «Le sujet, ce n’est pas les agences de notation, expliquait-on à Bercy il y a deux semaines. Le sujet est dans la crédibilité, qui se mesure chaque jour sur les marchés financiers, de nos émissions de dette, et la confiance que les investisseurs nous font et qui reste très forte.» D’autant que l’examen des effets de ces décisions ces dernières années montre leur faible impact sur les taux auxquels la France se refinance. Elles accentuent les tendances, expliquait l’économiste Anne-Laure Delatte à Libération l’an dernier. Leur impact symbolique et politique est quant à lui plus tangible.