Une nouvelle clé sous la porte pour un site industriel en France. Pas n’importe lequel : il s’agit de l’usine Meccano, qui produit à Calais les célèbres jouets de construction pour enfants. Son propriétaire, le groupe canadien Spin Master, a annoncé mardi qu’elle fermerait l’an prochain. La direction a informé dans la journée les représentants du personnel et salariés. Elle ouvrira le 2 mars la procédure légale prévoyant deux mois de négociations avec les partenaires sociaux, avant l’examen du projet de PSE par l’administration du travail.
Le groupe canadien pointe le «manque de compétitivité du site» pour justifier sa décision. Il a affirmé dans un communiqué n’avoir «plus d’autre choix que d’envisager l’arrêt des activités industrielles de l’usine de Calais d’ici le premier trimestre 2024». L’usine «n’est jamais parvenue à atteindre un équilibre financier», alors qu’elle est «confrontée à des conditions de marché difficiles, aggravées par la récente flambée des coûts des matières premières et de l’énergie», ajoute Spin Master.
Le groupe rappelle avoir investi «7 millions d’euros depuis 2014», sans pour autant arriver «à redresser durablement la situation». Il assure rester «ouvert à toutes propositions qu’un éventuel repreneur pourrait faire pour le site». La direction promet un «accompagnement individuel à chacun des 50 salariés concernés» et «engagera prochainement une négociation avec les partenaires sociaux pour définir les modalités d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)».
Un «choc pour les Calaisiens»
La réaction des élus locaux ne s’est pas fait attendre. «Cette annonce est d’une grande brutalité, il s’agit d’une usine historique», a dénoncé la maire (LR) de Calais, Natacha Bouchart, fustigeant «des méthodes pas du tout correctes». La direction locale «nous l’a appris ce matin, nous n’avions jamais été alertés auparavant sur des problèmes concernant l’activité». «Ce groupe a fait 55 millions de chiffre d’affaires en France en 2021, 2 milliards de dollars dans le monde. Il a les moyens de supporter les coûts supplémentaires de l’énergie», et «on se questionne» sur ses «vraies motivations», a souligné Natacha Bouchart. «Peut-être que le groupe essaye de récupérer la licence pour aller fabriquer au Mexique. Ou alors, il veut privilégier une autre de ses licences», a suggéré la maire. Un rendez-vous sera «rapidement fixé» avec les services de l’Etat pour étudier «les possibilités de faire appel à un repreneur», a-t-elle promis.
Pour le député LR du Pas-de-Calais Pierre-Henri Dumont, il s’agit d’un «choc pour les Calaisiens. Meccano c’est Calais et Calais c’est Meccano». il dénonce une «décision intolérable» et appelle à «trouver des solutions pour maintenir cette activité à Calais».
La pilule est dure à avaler pour les employés. «Le personnel est complètement abattu. On ne s’y attendait pas, a réagi Jean-François Sandras, délégué CGT chez Meccano, et salarié depuis 1984. On savait qu’il y avait des difficultés notamment sur l’énergie, mais en aucun cas on pensait à une fermeture définitive». Il déplore la mauvaise communication du groupe canadien : «On nous disait depuis trois, quatre ans, on redresse, et là d’un seul coup, la direction dit que ça fait dix ans qu’ils injectent de l’argent et que ça ne marche pas. On fait quand même partie d’un grand groupe, qui fait d’énormes bénéfices.»
Au rapport
Implantée à Calais depuis 1959 et acquise en 2014 par Spin Master, l’usine de Calais est «le seul site de production de jouets» appartenant au groupe canadien. Spin Master fait aussi produire des jouets Meccano et d’autres marques par «un réseau de partenaires», situés «en Europe, en Asie et en Amérique latine». Outre les Meccano, le site calaisien produit un «sable magique» à modeler, baptisé Kinetic Sand. Au total, «2,5 millions de boîtes» de ces deux marques sortaient chaque année de l’usine, selon un porte-parole de Spin Master.
La marque Meccano, commercialisée depuis 1907 — à partir de jouets conçus à Liverpool par le Britannique Franck Hornby — «restera propriété de Spin Master et sera repensée» en vue d’être «redynamisée», a-t-il ajouté.