Marianne a trouvé un potentiel nouvel acquéreur. Le propriétaire de l’hebdomadaire, le magnat tchèque Daniel Kretinsky, a abandonné ce jeudi 18 juillet les négociations avec le milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin, a révélé BFM Business, et se tourne désormais vers Jean-Martial Lefranc. Ce dernier, contacté par Libération, confirme que Daniel Kretinsky (par ailleurs prêteur de Libération) «a décidé d’entrer dans une nouvelle période d’exclusivité avec [lui] et le groupe d’investisseurs qui [l]’entoure».
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L’ancien patron de Fleurus presse et éditeur du magazine l’Ecran fantastique avait déjà proposé une offre de rachat «fin avril 2024», mais avait été écarté au profit de Pierre-Édouard Stérin, qui présentait plus de garanties financières au magazine. Au départ plutôt partante, la rédaction de Marianne avait fait volte-face en apprenant dans la presse les accointances entre le milliardaire et le Rassemblement national. Les journalistes s’étaient alors mis en grève à la fin du mois de juin, et obtenu que leur propriétaire suspende les négociations avec Pierre-Édouard Stérin, qui était pourtant sur le point de racheter le magazine.
Ce dernier a souhaité apporter des précisions à Libération sur l’abandon de la procédure. «Pierre Édouard Sterin tient à faire savoir qu’il a informé officiellement CMI de sa décision de se retirer du process de cession de Marianne le 17 juillet au matin. Sa décision de ne plus se porter acquéreur a été motivée par l’opposition manifeste de la rédaction du magazine à son offre de relance du journal», indique un proche collaborateur. «Il souhaite bonne chance à Natacha Polony [directrice de la rédaction, ndlr] et au journal.»
L’avortement définitif des négociations avec Pierre-Édouard Stérin, annoncé ce matin aux salariés, est un «soulagement», selon une journaliste du magazine. «La vente à Stérin devenait intenable. Le choix de Jean-Martial Lefranc est une bonne nouvelle puisqu’il a montré être capable d’élargir ses ressources financières grâce à son tour de table», ajoute-t-elle. Car pour ce rachat, le producteur et concepteur de jeux vidéo ne fait pas cavalier seul. Il serait accompagné du banquier d’affaires Philippe Englebert, ancien conseiller d’Emmanuel Macron. «Il s’occupe de monter le tour de table», confirme à Libé Jean-Martial Lefranc. Un troisième homme serait également pressenti dans l’attelage… l’ancien socialiste Julien Dray. Une information que se refuse à confirmer Jean-Martial Lefranc : «Pour l’instant, on a des échanges avec lui», dit-il sobrement.
Billet
Si financièrement, le rachat pourrait désormais tenir, les journalistes ont d’autres exigences. «Maintenant, on veut que Lefranc dise publiquement qu’il accepte les garanties d’indépendances portées par la rédaction», développait une rédactrice dans la journée. Ces dernières avaient été énoncées dans un communiqué de la Société des rédacteurs de Marianne, avec, entre autres, «l’adoption par le futur repreneur d’une charte éthique actant la non-intervention de l’actionnaire sur le contenu du journal». Selon un document consulté par Libération, Jean-Martial Lefranc s’est depuis engagé à l’écrit à respecter «les même règles d’indépendances d’ores et déjà négociées avec Pierre-Edouard Stérin».
Mise à jour à 14 h 05 avec davantage d’éléments et la réaction d’une journaliste de Marianne, à 18 h 26 avec la réaction de Pierre-Edouard Stérin, à 18h54 avec l’engagement écrit de Jean-Martial Lefranc.