Menu
Libération
Polémique

«Si je reviens, je reconnais avoir fait une faute» : Jean-Michel Aphatie quitte RTL après ses propos sur la colonisation en Algérie

Le journaliste a annoncé ce dimanche 9 mars qu’il ne reviendrait pas à RTL, estimant ne pas avoir fait de faute en tenant des propos à l’antenne fin février sur des «Oradour-sur-Glane en Algérie» qui auraient été commis par la France.
Jean-Michel Aphatie à Deauville, en 2016. (Charly Triballeau /AFP)
publié le 9 mars 2025 à 12h30
(mis à jour le 9 mars 2025 à 18h37)

Jean-Michel Aphatie ne reviendra pas au micro de RTL. Le journaliste a annoncé sa décision ce dimanche 9 mars dans un long message publié sur le réseau X, admettant avoir «créé le débat» avec ses propos sur la colonisation algérienne, mais refusant de reconnaître «une faute».

Jean-Michel Aphatie explique avoir d’abord compris sa suspension décidée par les dirigeants de RTL. «Je l’ai trouvée équilibrée et respectueuse à mon égard. Et puis, le jour de suspension est arrivé, retrace-t-il. C’était mercredi dernier. A partir de là, concrètement confronté à ce qu’il faut bien appeler une punition, ma perception de la situation s’est modifiée.» Et d’ajouter : «Même décidée dans le cadre d’un dialogue serein et compréhensif, une punition reste une punition. Si je reviens sur l’antenne de RTL, je la valide, donc je reconnais avoir fait une faute. C’est un pas que je ne peux pas franchir.»

«On s’est comportés comme des nazis ?»

«Je ne reviendrai pas à RTL. C’est ma décision», a-t-il ainsi déclaré dans le même message. «Chaque année, en France, on commémore ce qui s’est passé à Oradour-sur-Glane, c’est-à-dire le massacre de tout un village. Mais on en a fait des centaines, nous, en Algérie. Est-ce qu’on en a conscience ?» avait-il déclaré le 25 février, au sujet de la conquête de l’Algérie par la France au XIXe siècle. A Oradour-sur-Glane, village martyr du Limousin, une unité de la Waffen SS Das Reich remontant vers le front en Normandie massacra 642 habitants le 10 juin 1944. «On n’a pas fait Oradour-sur-Glane en Algérie», a d’abord rétorqué le présentateur Thomas Sotto. Mais «on s’est comportés comme des nazis ?» a-t-il ensuite interrogé. «Les nazis se sont comportés comme nous», lui a répondu Jean-Michel Aphatie.

Dans son message sur X, le journaliste dit attacher «un prix particulier à la question de la présence française en Algérie entre 1830 et 1962», confiant avoir été «horrifié» par ce qu’il a «lu dans les livres écrits par des historiens méticuleux». «Pour cette raison […], je ne peux pas accepter d’être puni […]. Je regrette la situation qui s’est créée», affirme-t-il, ajoutant avoir «passé de belles années professionnelles à RTL, […] une radio que j’aime». Egalement chroniqueur dans Quotidien sur TMC, Jean-Michel Aphatie intervenait régulièrement dans la matinale de RTL.

«RTL n’avait pas de problème à garder Eric Zemmour»

Dans une vidéo postée sur X par l’émission «C médiatique», sur France 5, il ajoute: «Ce débat sur l’inhumanité de la France vis-à-vis de ses conquêtes coloniales, il faut reconnaître qu’il ne peut pas être exposé dans les médias. Encore aujourd’hui. Alors que c’est ça le problème, nous avons commis des crimes atroces et nous ne l’avons pas reconnu».

Sollicitée par l’AFP, la direction de RTL a indiqué qu’elle ne ferait «pas de commentaire» sur la décision du journaliste. Le journaliste de Mediapart, Fabrice Arfi, invité de «C médiatique», a apporté «tout (s)on soutien» à Jean-Michel Aphatie. «RTL n’avait pas de problème à garder Eric Zemmour, pourtant condamné pour des faits de racisme. Quand un chroniqueur comme Jean-Michel Aphatie vient rappeler (...) des faits historiques - pas des opinions-, parce que ça chatouille les oreilles des extrémistes de l’extrême droite, alors ça devient inapproprié ?», a-t-il lancé.

Les propos du chroniqueur ont suscité plusieurs signalements auprès de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, qui a comme habituellement en pareil cas ouvert une instruction, le 26 février, pour déterminer si la radio a commis un manquement à ses obligations. Des responsables politiques avaient également réagi, à l’instar du président du RN, Jordan Bardella, fustigeant «une odieuse falsification de l’Histoire et une insulte à tous les rapatriés d’Algérie». Ces échanges interviennent alors que les tensions entre France et Algérie sont vives.

Mise à jour : à 18 heures, avec la réaction de Fabrice Arfi.