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Libération
Vingt ans après

Traité constitutionnel européen : «Libération» en 2005, un «journal coupé en deux»

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Entre affrontement générationnel et fossé hiérarchique, le référendum de 2005 a divisé la rédaction. Des journalistes reviennent sur les profonds désaccords de l’époque.

(libération)
ParJean-Baptiste Chabran
Journaliste - Economie
Publié le 28/05/2025 à 5h47

Nous sommes en mai 2005. Toute la France est divisée. Toute ? Oui. Un peu partout dans le pays, le débat sur le traité constitutionnel européen, soumis au référendum, anime les meetings politiques, clive les réunions publiques et provoque esclandres et déchirements dans les dîners de famille. Et à l’image de la France, la rédaction de Libération – encore dirigée à l’époque par son cofondateur, Serge July – ne fait pas exception.

«Le journal était coupé en deux», se souvient l’actuel directeur délégué de la rédaction, Paul Quinio (1). A Libération, environ 350 salariés à l’époque, la division est double. Il y a d’abord ce que Michel Becquembois, alors journaliste au service édition, considère être un «affrontement générationnel», entre une jeunesse pour qui «l’Europe peut être remise en cause» et qui soutient proportionnellement davantage le «non» et une ancienne génération, qui a grandi dans le souvenir de la guerre et pour qui la construction européenne «ne se discute pas et va de soi». Jean Quatremer, correspondant européen de Libé depuis janvier 1992, constate aussi cette «séparation générationnelle» : «Pour la mienne, l’Europe était une évidence totale. Mais pour les plus jeunes, ce n’était pas le cas.»

Un deuxième facteur de division est à chercher du côté du statut et de la position dans le journal. Pour grossir le trait, plus on avait de responsabilité à Libé, plus on était susceptible de voter «oui».