Menu
Libération
Pouvoir d'achat

Prêts immobiliers : la Banque de France appelle à ne pas freiner leur octroi et veut surveiller les refus

Dans une période atone pour le secteur, le gouverneur de l’institution, François Villeroy de Galhau, veut mieux contrôler les rejets et réfléchit à «une procédure amiable» dans certains cas.
Selon le gouverneur de la Banque de France, on atteint un "point bas" en matière d'octroi de crédits immobiliers. (Fiora Garenzi/Hans Lucas. AFP)
publié le 17 novembre 2023 à 18h19

La baisse brutale du nombre de crédits immobiliers n’a pas échappé à la Banque de France. Ce vendredi 17 novembre, son gouverneur, François Villeroy de Galhau, intime au secteur financier français «d’assurer un financement sain de l’économie française» et particulièrement continuer à octroyer des prêts immobiliers. Il y a urgence pour le secteur, asphyxié par la politique des taux de la Banque centrale européenne depuis plus d’un an : avec 9,2 milliards d’euros de prêts octroyés en septembre, on a atteint un «point bas», selon le gouverneur.

«Le taux de refus des banques, à risque égal, ne devrait pas augmenter. Soyons clairs, ce taux n’est pas précisément mesuré, et ceci justifie sans doute beaucoup d’interprétations et de suspicions. Il existe un sentiment diffus qu’il a monté», relève le gouverneur, en ouvrant la conférence annuelle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Or le gouverneur ne voit «aucune justification à cela», car la rentabilité et la liquidité des banques ne devraient pas être un frein selon lui.

«La suspicion [contre les banques] n’est bonne pour personne»

«Il subsiste une interrogation répandue sur l’offre, et le fait que “les banques ne prêteraient plus”», estime François Villeroy de Galhau. Cette suspicion, même si elle est exagérée, n’est bonne pour personne : ni pour les banques et leur image ; ni pour le secteur du logement, car elle peut contribuer à une autocensure des emprunteurs ; ni pour la qualité du diagnostic économique d’ensemble.»

«Il apparaît nécessaire et d’intérêt collectif de mieux suivre ces taux de refus», juge-t-il. Villeroy de Galhau invite banques et pouvoirs publics à «réfléchir» à ouvrir une procédure amiable pour «les crédits immobiliers apparemment solvables et qui auraient donné lieu à refus», comme cela existe pour le crédit aux entreprises. Concernant les prêts à taux zéro, les conditions d’accès avaient d’ailleurs été assouplies début octobre par le gouvernement.

Le gouverneur de la Banque de France a par ailleurs défendu les normes du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF), qui a refusé d’assouplir les critères d’octroi de crédit en septembre. Ces normes limitent la durée des prêts à 25 ans et leur poids par rapport au revenu des ménages (taux d’endettement maximum de 35 %) et sont critiquées par les banquiers. Mais Villeroy de Galhau a rappelé qu’elles ont «rempli [leur] mission» pour endiguer le surendettement. Il note par ailleurs que les banques peuvent déroger à ces règles pour 20 % des prêts, mais qu’elles ne l’ont fait que dans 14,3 % des cas au troisième trimestre. Et fustige : «Utiliser plus les flexibilités, plutôt que les contester, c’est la meilleure façon pour les banques de produire plus de crédits.»

Demande de crédit des ménages en baisse

Dans un courriel, la Fédération bancaire française (FBF) rappelle de son côté que «depuis plusieurs mois, la demande de crédit des ménages diminue nettement, sous l’effet de la hausse des taux […], alors que les prix de l’immobilier et l’offre de logements étaient stables». «Les conseillers bancaires sont toujours à l’écoute de leurs clients pour trouver des solutions, et accorder des prêts responsables, dans ce cadre complexe et contraint», assure-t-elle, ajoutant que la profession «travaille bien entendu en lien avec les pouvoirs publics pour proposer des améliorations continues, notamment dans cette matière importante pour les ménages».

Mais plus généralement, François Villeroy de Galhau salue la «grande résilience» du secteur financier français, en dépit d’«un niveau exceptionnel d’incertitude». Même si l’importance des taux fixes dans les crédits immobiliers dans l’Hexagone ralentit le processus pour les banques françaises, le relèvement des taux d’intérêt et la stabilisation du taux du Livret A ont renforcé la rentabilité et la solvabilité des banques françaises. Les assureurs ont également profité de la hausse des taux, a-t-il souligné. Contrairement aux Français qui auraient souhaité emprunter pour acheter un appartement ou une maison.