Les usagers attendaient depuis plusieurs semaines le montant de l’augmentation des prix de l’électricité. Ce dimanche 21 janvier, Bruno Le Maire a annoncé une augmentation entre 8,6 % (tarifs de base) et 9,8 % (usagers en heures pleines-heures creuses) pour «97 % des Français». Cette déclaration acte la fin progressive du bouclier énergétique, lancé à l’automne 2021 par le gouvernement pour limiter les hausses des tarifs de l’électricité et du gaz. «C’est une décision difficile mais nécessaire pour garantir notre capacité d’investissement et sortir définitivement du quoi qu’il en coûte, a expliqué le ministre de l’Economie sur TF1. La prochaine hausse aura lieu le 1er février 2025 et nous reviendrons à la situation avant le bouclier tarifaire.»
Au vu de la seule évolution des prix ces derniers temps, cette augmentation semble contre-intuitive. Les prix de gros de l’électricité ont en effet baissé de plus de 30 % ces six derniers mois, et la Commission de régulation de l’énergie (CRE) a donc recommandé début janvier une baisse moyenne du tarif réglementé de 0,35 % (hausse de 0,01 % pour les ménages et baisse de 3,67 % pour les professionnels). Mais la facture des clients va malgré tout augmenter au 1er février.
Car tout se joue au niveau des taxes. Alors que l’Etat prend encore en charge 37 % de la facture d’électricité des Français, la fin graduelle de cette aide, prévue pour 2025, passe par leur augmentation pour les ramener à leur niveau d’avant-crise. Un amendement au projet de loi de finances 2024 a d’ailleurs été prévu à ce sujet par le gouvernement. Jusqu’en 2025, les factures d’électricité ne devraient donc pas baisser et, selon la présidente de la CRE, Emmanuelle Wargon, cette hausse à venir est «une décision gouvernementale».
Dans un brief téléphonique à la presse, Bruno Le Maire précise l’évolution de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE). A 3,2 centimes le kWh avant le bouclier tarifaire, la TICFE avait été ramenée à 0,1 centime au début du dispositif. A partir du 1er février 2024, elle sera ramenée à 2,1 centimes le kWh et reviendra à 3,2 centimes au 1er février 2025. Le ministre de l’Economie explique que «nous voulons continuer à investir massivement» dans le parc de production électrique et «doubler» la production d’énergie décarbonnée. «C’est ce défi de long terme qu’il faut rappeler», a insisté ce dimanche soir Bruno Le Maire. Le coût du bouclier tarifaire, électricité, gaz et carburant, est estimé par Bercy à plus de 90 milliards d’euros.
Pas de baisse malgré la baisse de l’inflation
Lors de son grand raout du 16 janvier, Emmanuel Macron avait annoncé la couleur : «Le prix [de l’électricité] va revenir dans la norme et surtout il restera, quel que soit ce que le gouvernement annonce dans les prochains jours, substantiellement inférieur à ce qui est payé en Allemagne, en Espagne, en Italie.»
Les oppositions avaient de leur côté fait pression sur le gouvernement. Reçu vendredi à Matignon, Jordan Bardella a demandé à Gabriel Attal de «renoncer» à la hausse des tarifs réglementés de l’électricité, «inquiétude majeure» des «classes populaires et moyennes» […] «considérant qu’elle serait la goutte de trop non seulement pour les familles françaises, mais aussi pour nos chefs d’entreprise». Et de juger «nécessaire de sortir des règles de fixation des prix du marché européen de l’électricité, qui fait que la France ne paie plus aujourd’hui l’électricité au prix qu’elle la produit».
«Si monsieur Attal voulait donner comme signal qu’il tient compte des préoccupations des Français, il pourrait annuler l’augmentation de l’électricité de 10 % au 1er février», déclarait de son côté Manuel Bompard, le coordinateur national de la France insoumise, le 11 janvier. Bruno Le Maire vient, lui, d’acter que la baisse de l’inflation en 2024 ne passera pas forcément par la baisse des prix de l’énergie.
Mise à jour à dimanche 21 janvier 20h40 : avec des précisions sur la TICFE lors d’un brief téléphonique.
Mise à jour lundi 22 janvier à 18h20 : avec le montant du bouclier tarifaire corrigé.