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Comptes publics

Réduction de déficit : Moody’s juge «improbable» que la France tienne son objectif d’ici à 2027

Selon l’agence de notation, les 10 milliards d’euros supplémentaires d’économies prévus en 2024 ne suffiront pas à redresser la trajectoire. Le Sénat annonce dans le même temps le lancement d’une mission parlementaire sur la dégradation du déficit.
Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, le 25 janvier à Paris. (Xose Bouzas/Hans Lucas.AFP)
publié le 27 mars 2024 à 15h15

Au lendemain de la publication de l’Insee confirmant le dérapage des comptes publics de la France, l’agence de notation Moody’s juge ce mercredi 27 mars «improbable» que le pays tienne son objectif de réduction de déficit. Le gouvernement table en effet sur une réduction du déficit à 2,7 % du PIB d’ici à 2027, selon le plan budgétaire à moyen terme présenté en septembre. C’est un signal important, alors que les agences Moody’s et Fitch annonceront officiellement le 26 avril la nouvelle note de la dette française.

Le déficit public de la France a atteint 5,5 % du PIB en 2023, selon l’Insee. Un chiffre bien loin des 4,9 % que le gouvernement espérait maintenir : sa prévision a été dépassée de 15,8 milliards d’euros et de 0,6 point de pourcentage. Bruno Le Maire a malgré tout réaffirmé mardi sa «détermination totale» à repasser sous la barre des 3 % en 2027.

Dans le même temps, la commission des Finances du Sénat a annoncé ce mercredi le lancement d’une mission parlementaire sur la dégradation du déficit public et le «défaut d’information du Parlement». Le but de cette «mission flash» sera de «faire la lumière complète sur la dégradation des finances publiques depuis 2023 et son suivi par l’administration et le gouvernement». «Seul un état des lieux lucide, objectif et sincère peut permettre de proposer des réponses appropriées à la situation actuelle», a affirmé mardi Jean-François Husson, rapporteur général du budget, affilié à LR. Jean-François Husson, avait mené la semaine dernière une mission de contrôle à Bercy et dévoilé les prévisions du Trésor. Il sera le rapporteur de cette mission, qui sera présidée par le socialiste Claude Raynal, le président de la commission des Finances.

«Recettes plus faibles que prévu»

«Le déficit plus important que prévu est quasiment entièrement dû à des recettes plus faibles que prévu», ajoute l’agence de notation. Ce déficit plus élevé «souligne les risques inhérents à la stratégie budgétaire à moyen terme du gouvernement, qui se base sur des hypothèses économiques et de recettes optimistes, ainsi que des baisses sans précédent de la dépense», juge-t-elle. Pour l’agence de notation, les 10 milliards d’euros d’économies supplémentaires annoncés pour 2024 seront insuffisants pour «remettre le gouvernement sur la trajectoire» budgétaire prévue.

Réduire le déficit d’un point de pourcentage en un an, hors circonstances exceptionnelles liées au Covid-19, «n’a été fait qu’une seule fois depuis 2000», rappelle l’agence. Elle s’attend également à ce que le niveau de la dette publique remonte «lentement» à partir de 2024, exposant le pays à des coûts liés aux intérêts «jamais vus en plus de vingt ans».

Moody’s précise en revanche qu’il ne s’agit pas d’un avis de notation à proprement parler. Elle se prononcera officiellement, comme Fitch, le 26 avril sur la note de la dette française – Standard & Poor’s suivra le 31 mai. Les agences pourraient remettre en question le «AA» attribué au pays depuis plusieurs années. Cancre européen en matière de réduction du déficit public, la France pourrait voir sa capacité à rembourser sa dette être amoindrie et par conséquent devoir contracter de nouvelles créances à des taux d’intérêt plus élevés.