Entre l’Amérique du Nord et la France, le cœur de Safran a basculé en faveur de l’Ain. Juste avant la publication de ses résultats semestriels, le motoriste français a annoncé, ce jeudi 31 juillet, l’investissement, à terme, de 450 millions d’euros pour l’implantation d’une nouvelle usine à Ambérieu-en-Bugey, à 50 km à l’est de Lyon, destinée à fabriquer des freins carbone. L’entrée en service est prévue pour 2030.
Une occasion manquée pour Donald Trump dont la guerre commerciale entend inciter les entreprises des secteurs stratégiques à localiser leur production sur le sol américain. Le site élu, le parc industriel de la plaine de l’Ain, était en concurrence avec d’autres lieux dans l’Oregon (Etats-Unis), au Québec, dans le Territoire de Belfort et la métropole de Lyon.
Safran est le leader mondial des freins carbone dont il équipe 55 % des avions commerciaux de plus de 100 places. Destinés au secteur aéronautique, ils sont plus performants et plus légers que les freins traditionnels en acier, «permettant aux opérateurs de réduire leur consommation de carburant», s’est félicité le groupe.
«Merci à EDF»
Emmanuel Macron a immédiatement salué sur les réseaux sociaux «un choix de souveraineté et de réindustrialisation» qui s’inscrit dans son ambition de relocaliser la production stratégique en France, avant d’adresser ses remerciements : «Merci à EDF : notre électricité propre et compétitive attire les leaders mondiaux.»
Car c’est bien la promesse d’un accès à une électricité abordable qui a convaincu Safran de s’implanter en France. «L’énergie pouvant représenter jusqu’à 30 % du coût de fabrication d’un frein carbone, la garantie pour cette nouvelle usine d’un accès sécurisé à une électricité décarbonée à un prix stable et compétitif à long terme a permis ce choix d’implantation», a expliqué le groupe dans un communiqué.
Le projet a fait l’objet de négociations directes entre EDF et Safran, notamment sur le prix du mégawattheure, a indiqué le ministère de l’Economie à l’AFP, sans que le chiffre ne soit précisé. Un effort a également été promis par RTE, le gestionnaire de l’électricité en France, pour raccourcir le délai de raccordement du site de 60 mois en moyenne à 45 mois. Un argument qui pèse souvent dans le choix d’une implantation pour les industriels.
15 millions d’euros de subvention de l’Etat
L’annonce de l’installation de cette usine en France avait été faite dès 2019 par Emmanuel Macron. Il aura fallu attendre six ans pour que le projet se concrétise. L’Etat a fourni une subvention à hauteur de 15 millions d’euros et la région a promis 16 millions d’euros, a précisé Bercy.
«Cette implantation est un signal fort pour l’Ain, qui confirme son potentiel industriel et sa capacité à attirer des investissements technologiques majeurs», a réagi Olga Givernet, députée Ensemble de l’Ain et ancienne ministre de l’Energie du gouvernement Barnier, dans un communiqué de presse.
Cette annonce a été faite en marge des résultats semestriels de Safran, publiées ce jeudi. L’équipementier et motoriste affiche un chiffre d’affaires en pleine croissance à 14,8 milliards d’euros au premier semestre 2025, soit en hausse de 13,2 %. Par ailleurs, son résultat opérationnel courant a bondi de 27 %. «Safran a enregistré d’excellents résultats au premier semestre 2025, avec une marge opérationnelle record de 17 % […] portée par la vigueur des activités de services pour moteurs civils», a indiqué Olivier Andriès, directeur général de Safran.
La branche propulsion, avec un résultat opérationnel en hausse de 37 %, a profité de la forte demande de moteurs civils. De même pour la division équipements et défense (+7 %) qui produit notamment les trains d’atterrissage et les freins carbone.
Cette bonne santé financière a conduit Safran à relever l’ensemble de ses prévisions annuelles d’autant que les négociations commerciales avec les Etats-Unis lui sont favorables : «S’agissant du commerce international, nous saluons les avancées en vue d’une exemption des droits de douane transatlantiques sur la majorité des produits aéronautiques.»