Le creux de la vague. Si la France devrait continuer à échapper à la récession, elle connaît une fin d’année avec une activité économique poussive. Dans sa dernière note de conjoncture, l’Insee revoit à la baisse sa prévision de croissance pour le quatrième trimestre de cette année, il l’attend à désormais «0» après le recul de «0,1 %» au troisième trimestre. La consommation des ménages, moteur essentiel de l’activité, patine, en lien notamment avec les «températures clémentes qui ont entraîné de moindres dépenses d’énergie», souligne l’Insee. «La production industrielle serait également quasi stable, tandis que l’investissement fléchirait», indique aussi l’institut de statistiques. Seules les livraisons aéronautiques et navales attendues en fin d’année viendraient soutenir les exportations. Résultat, en moyenne sur cette année, le PIB ne progresserait que de 0,8 %. C’est moins que le 1 % inscrit par le gouvernement dans ses textes budgétaires, comme le projet de budget actuellement à l’Assemblée nationale.
Pour l’an prochain, la situation devrait s’améliorer à la faveur d’une reprise de la consommation. Néanmoins la prévision gouvernementale, qui table sur une croissance de 1,4 %, semble également optimiste, comme cela a déjà été par ailleurs signalé par plusieurs organisations, de l’Organisation de coopération et de développement économiques au Haut Conseil des finances publiques. Si l’Insee ne fait pas de prévision au-delà de l’été, il calcule que l’acquis de croissance à mi-année serait de 0,5 %, c’est-à-dire ce que serait la croissance annuelle si la croissance était nulle aux deux derniers trimestres. «Il faudrait une activité très forte au second semestre pour atteindre 1,4 %», remarque Julien Pouget, chef du département de la conjoncture à l’Insee. Ce qui semble très hypothétique.
Accalmie de l’inflation
Côté bonnes nouvelles, l’an prochain devrait être marqué par une nette accalmie sur le plan de l’inflation. Le choc des prix de l’énergie semble se dissiper. L’indice des prix à la consommation devrait retrouver des hausses plus ordinaires, autour de 2,5 % à partir du printemps (et de 2 % pour l’inflation sous-jacente, quand les prix les plus volatils sont exclus). Il se rapprocherait enfin des objectifs de la Banque centrale européenne (BCE). Ce qui n’empêchera pas les prix de l’alimentation d’augmenter encore nettement en janvier, avec + 6,2 % sur un an prévu par l’Insee, avant de ralentir, avec une hausse de 1,9 % en juin. Les prix à la consommation des services, devenus les premiers contributeurs de l’inflation depuis octobre et qui pèsent pour la moitié de la consommation des ménages, «resteraient soutenus sans pour autant accélérer», note l’Insee.
Autre amélioration en vue, même si le retard accumulé ces derniers mois ne sera pas rattrapé, les salaires devraient enfin croître un peu plus que les prix, en moyenne. Malgré des versements attendus comme massifs des primes de partage de la valeur en fin d’année, le salaire moyen par tête réel (en tenant compte de l’inflation) reculerait de 0,3 % cette année. Il progresserait en revanche de 0,7 % sur un an au deuxième trimestre 2024.
Remontée du chômage
Le pouvoir d’achat ne devrait pas reculer en 2023, en hausse attendue de 0,8 %, et de 0,3 % en le calculant par unité de consommation. Un maintien à rapprocher du dynamisme des revenus du patrimoine. Enfin, «sous l’effet des prestations sociales et notamment de l’indexation sur l’inflation des retraites de base», relève l’Insee, le pouvoir d’achat pourrait être plus «dynamique», avec +1,2 % à mi-2024, 0,8 % par unité de consommation.
Plusieurs points de la conjoncture économique devraient en revanche se dégrader. A commencer par l’emploi. L’Insee anticipe une remontée du chômage, moins prononcée toutefois que les prévisions réalisées par d’autres spécialistes de la conjoncture. Dans son scénario central, le nombre d’emplois salariés créés resterait quasiment stable et le taux de chômage passerait de 7,4 % de la population active au troisième trimestre, à 7,6 % au premier trimestre 2024. Les taux d’intérêt élevés pèseraient aussi sur l’activité, en particulier sur l’investissement des entreprises. Même si la BCE vient ce jeudi 14 décembre, pour la deuxième fois consécutive, de laisser ses taux directeurs inchangés, elle les a augmentés très significativement les mois passés, ce qui continue d’avoir des répercussions dans l’économie réelle. Malgré cette période de crises successives, les entreprises non financières ont largement préservé leurs taux de marge (autour de 33 %). Ces derniers devraient même rebondir en début d’année, avec notamment les conséquences de la baisse de la cotisation de la valeur ajoutée des entreprises décidée par le gouvernement. Un niveau supérieur à celui de 2019.