L’emploi salarié poursuit sa progression, malgré l’incertitude qui pèse sur l’économie. Dans son estimation flash publiée ce vendredi, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) enregistre 102 000 créations nettes de postes dans le secteur privé, au deuxième trimestre 2022, soit une augmentation de 0,5 % par rapport au premier trimestre. Il s’agit de la sixième hausse trimestrielle consécutive.
Cette bonne santé est une surprise compte tenu de la guerre en Ukraine et de la flambée des coûts de l’énergie. Dans sa note de conjoncture de fin juin, l’Insee avait prévu 37 000 emplois de plus entre fin mars et fin juin. L’économie française en a donc créé près de trois fois plus… Au total, l’emploi salarié privé dépasse désormais son niveau d’avant la crise sanitaire (fin 2019) de 3,8%, soit une hausse de 754 200 emplois. La dynamique de l’emploi se maintient, conjuguée à un taux de chômage modéré (7,3% au premier trimestre, selon l’Insee).
La locomotive du tertiaire marchand
Dans le détail, les services marchands (hors intérim) servent de rampe de lancement, affichant une hausse de 0,8% du nombre d’emplois supplémentaires (+97 300), après une hausse de 0,6% au premier trimestre. «Ce dynamisme explique l’essentiel de la hausse totale de l’emploi salarié privé», note l’Insee. Le tertiaire non marchand a aussi augmenté nettement de 0,7%, soit 19 500 emplois en plus, alors que l’institut tablait sur une stabilité. Seul l’intérim connaît un reflux (−2,1%), pour la deuxième fois consécutive, après une année 2021 prospère. Il reste tout de même à un niveau supérieur à celui d’avant-crise. Parmi les secteurs stables figurent l’industrie, l’agriculture et la construction.
«Depuis 2020, on se fait surprendre par la hausse des embauches», reconnaissait en juin Vladimir Passeron, chef du département de l’emploi et des revenus d’activité de l’Insee, pointant le ralentissement de la croissance. La stagnation de la productivité et le boom de l’apprentissage expliqueraient en grande partie ce paradoxe. Si le gouvernement a annoncé en mai que les aides aux entreprises pour la signature de contrats d’apprentissage étaient prolongées «au moins» jusqu’à la fin de l’année, celles versées aux centres de formation vont peu à peu baisser.
Fin juin, France compétences – l’instance nationale de régulation et de financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage – a décidé, pour viser une économie de 800 millions d’euros, de les raboter de 10% en deux temps : -5% dès septembre avant une seconde baisse du même ordre en avril 2023. Selon le Monde, cinq organisations représentant les centres de formation ont écrit, mardi, au chef de l’Etat pour lui faire part de leur «incompréhension» et «stupéfaction» quant à ce premier coup de sécateur.