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Assurance chômage : l’Unédic prévoit de rester dans le vert, malgré les prélèvements de l’Etat

Pas aidés par le gouvernement qui se sert dans les caisses pour financer ses réformes, les gestionnaires syndicaux et patronaux de l’assurance chômage s’inquiètent de voir leur rôle restreint à l’avenir.
Pour la période 2024-2027, l’organisme aux mains des acteurs sociaux prévoit de rester dans le vert de manière constante. (Vincent Loison/Sipa)
publié le 20 février 2024 à 19h12

Une nouvelle réforme de l’assurance chômage si la trajectoire financière du régime «dévie» ? A ce stade, rien n’indique que le Premier ministre, Gabriel Attal, qui a proféré cette menace lors de son discours de politique générale, trouve un motif acceptable au cours des prochains mois pour intimer aux syndicats et au patronat de retourner au métier et durcir à nouveau les règles d’indemnisation des demandeurs d’emploi. C’est en substance ce qu’indiquent les dernières prévisions de l’Unédic, l’association paritaire qui gère les finances de l’assurance chômage, dévoilées ce mardi 20 février. Pour la période 2024-2027, l’organisme aux mains des acteurs sociaux prévoit de rester dans le vert de manière constante, grâce notamment à une baisse du nombre de chômeurs indemnisés à compter de 2025 – un résultat de la conjoncture économique, qui devrait s’améliorer après une année 2024 atone, et des dernières réformes adoptées pour durcir les droits des demandeurs d’emploi. Les excédents monteraient ainsi à 1,1 milliard d’euros cette année, puis 3 milliards en 2025, 5,3 milliards en 2026 et 11,2 milliards en 2027. Cela devrait permettre à l’Unédic de ramener son endettement à 38,6 milliards d’euros en 2027, contre 59,1 milliards fin 2023.

Un solde inférieur aux prévisions précédentes

«Une trajectoire financière positive» dont se félicite Jean-Eudes Tesson, le nouveau président de l’Unédic issu du Medef, même si, souligne-t-il, le solde apparaît désormais inférieur aux prévisions précédentes, qui dataient de septembre. La faute à une «conjoncture moins facile» (l’Unédic ayant révisé à la baisse ses prévisions de croissance), mais surtout, insiste-t-il, aux prélèvements imposés par l’Etat sur les recettes, qui «amputent notre capacité à rembourser la dette». Car pour financer ses dernières réformes du marché de l’emploi, le gouvernement a prévu de ponctionner 12 milliards d’euros sur la période 2023-2026. 2 milliards ont déjà été prélevés fin 2023, et 2,6 milliards le seront en 2024. Pour ce faire, l’Etat réduit tout simplement sa compensation des exonérations de cotisations salariales entrées en vigueur en 2018 (depuis lors, les salariés ne cotisent plus à l’assurance chômage, et c’est la CSG qui compense).

«Si les prévisions sont moins bonnes, c’est d’abord dû à des décisions de l’Etat»

Dans l’hypothèse où ces prélèvements n’auraient pas lieu, les gestionnaires de l’Unédic soulignent que le désendettement serait beaucoup plus rapide, puisque la dette ne se monterait plus qu’à 25,5 milliards d’euros en 2027. La vice-présidente (CFDT) de l’Unédic, Patricia Ferrand, souligne donc que «si les prévisions sont moins bonnes, c’est d’abord dû à des décisions de l’Etat». Propos ainsi complété par Jean-Eudes Tesson : «On accepterait difficilement que l’Etat nous dise : “Il y a une déviation [de la trajectoire] parce qu’on vous a prélevé 12 milliards d’euros.”» Avertissement lancé à Gabriel Attal, avec une crainte en arrière-plan : «Une évolution de la gouvernance et plus précisément un renversement des rôles» entre l’Etat et les acteurs sociaux, ramenés à un simple rôle d’«opérateur financier», résume Jean-Eudes Tesson.