Il ne se passe pas une demi-heure depuis plusieurs jours sans qu’une entreprise, une fédération ou une centrale syndicale appelle à une grève. Avec une date qui revient dans toutes les bouches : le 18 octobre. Une intersyndicale (CGT, Solidaires, FO et FSU) a appelé à la grève ce jour-là et la CGT de la fonction publique d’Etat a déposé un préavis de grève. Mais c’est notamment dans le secteur privé que les conflits éclatent. Tour d’horizon de secteurs qui bouillent.
Energie
Le secteur de l’énergie est particulièrement dans l’actualité. Les conflits sociaux qui s’y déroulent sont donc observés avec attention. La puissante FNME-CGT, qui représente notamment les salariés du gaz et de l’électricité, est sur tous les fronts depuis plusieurs mois. Et les événements dans les raffineries n’ont fait qu’avancer au 18 octobre des mobilisations qui couvaient. «Nous sommes dans la continuité de notre plan d’action et de la journée d’action du 29 septembre, précise Julien Lambert, de la FNME. Nous soutenons bien évidemment les salariés des raffineries mais la date du 18 octobre, c’est surtout un moment de convergence car il y a un tronc commun à beaucoup de luttes actuellement, sur les salaires, les retraites et le droit syndical.»
Quatre centrales nucléaires sont perturbées par des grèves, un mouvement que celle de Gravelines (Nord), la plus puissante d’Europe de l’Ouest, a rejoint jeudi. «Nous devons être à l’écoute du mécontentement de la base et de nos militants, notamment sur la question du pouvoir d’achat en cette période d’inflation», explique Julien Lambert, pour qui les réquisitions résonnent avec la garde à vue, début octobre, de quatre employés de RTE dans les locaux de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) pour des coupures de courant, une «criminalisation du droit de grève» aux yeux de la CGT.
Transports
Le secteur des transports avait été très actif lors du conflit sur les retraites fin 2019. Depuis cette semaine, plusieurs dépôts bruissent d’une entrée en grève et des fédérations entrent dans le mouvement. Pouvoir d’achat, pénurie de main-d’œuvre, conditions de travail… La CGT RATP et cheminots ainsi que SUD rail ont appelé à la grève le 18 octobre. Mais le technicentre SNCF du Landy (Saint-Denis), qui s’occupe des TGV de Paris Nord, des Eurostar et des Thalys, sera en grève dès lundi.
Jeudi, c’était notamment des militants de la CGT, de l’Unsa et de FO qui bloquaient le dépôt de bus des Lilas. Une mobilisation qui aura aussi lieu sur le bitume : la CGT routiers a appelé à la grève le 18 octobre. Pour la Fédération des transports CGT, «le 18 octobre doit être un temps fort dans notre processus de mobilisations».
Industrie
Le secteur de la métallurgie est particulièrement touché par les mutations industrielles en cours et des conflits sociaux qui en découlent. Alors que Renault et les fonderies étaient mobilisées depuis plus d’un an, certains sites de Stellantis sont en grève. Chez PSA-Rennes, la CFDT et la CGT ont une nouvelle fois débrayé mardi pour «une augmentation générale des salaires».
«Chez Renault aussi, la question de la hausse des prix est sur toutes les lèvres, explique de son côté Florent Grimaldi, délégué CGT du centre technique de Lardy (Essonne). Mais les menaces sur l’emploi et la désorganisation liée aux nombreux départs “volontaires” pèsent sur le moral, notamment dans l’ingénierie.» «Cette situation peut changer rapidement, on sent que la grève des raffineurs fait réfléchir malgré les désagréments liés à la pénurie de carburant», ajoute-t-il avant de préciser que des salariés de plusieurs sites vont participer à la grève (Cléon, Flins, Lardy, etc.) du 18 octobre «pour montrer leur ras-le-bol et exiger des augmentations de salaires pour tous».
Pour Jean-Louis Peyren, le coordinateur CGT de Sanofi, la période alimente les motivations. «Le pétrole a ouvert une brèche, je crois qu’il faut en profiter, avoir le courage d’y aller», dit-il. Chez le géant du médicament, les NAO doivent débuter mi-novembre. Mais la CGT envisage déjà de se joindre à la journée de mobilisation du 18 octobre voire, pourquoi pas, «de poursuivre après». «N’en déplaise à Laurent Berger [le secrétaire général de la CFDT, ndlr], il vaut mieux faire du “préventif”», poursuit Jean-Louis Peyren, «car demain, ça va être compliqué pour tout le monde».
Chez Safran, des sites se sont mobilisés dans toute la France jeudi afin de demander un rattrapage de l’inflation sur les salaires et un déblocage de l’épargne salariale, après deux ans de vaches maigres. «Les résultats de notre réunion avec la direction mercredi ne sont pas là et si cela ne bouge pas, nous nous mobiliserons de nouveau le 26 octobre», promet Didier Jouanchicot, coordinateur CFE-CGC du groupe. Un climat social tendu au sein de l’entreprise mais qui reste déconnecté du mouvement qui converge depuis le début de semaine.
Commerce et banques
Sans attendre le 18 octobre, la fédération des commerces et services de la CGT a appelé les salariés des secteurs qu’elle recouvre à se mettre en grève dès jeudi. A la mi-journée, son secrétaire fédéral, Charles Dassonville, affirmait que «des entrepôts commencent à se mettre en grève dans la logistique, dans la sécurité, dans l’habillement… la sécurité dans le nucléaire va probablement se mettre en grève aussi». Il a également envoyé des préavis de grève dans les aéroports. «Le but est d’aller crescendo jusqu’au 18 octobre», explique-t-il.
L’intersyndicale (CFDT, CGT, SNB CFE-CGC et Unsa) d’Arkéa, filiale du Crédit mutuel, appelle elle aussi à une grève «à partir du 18 octobre», accusant la direction de «quitter la table des négociations» sur la question des primes mais aussi des conditions de travail. Au Havre, La Rochelle ou encore Caen, des appels à la grève ont également été lancées dans des magasins Monoprix pour la journée de vendredi, selon la CGT qui évoque aussi des «actions ciblées» en Ile-de-France. «Les conditions de travail sont dégradées et les salaires n’augmentent pas. La réouverture des NAO n’est pas du tout satisfaisante. Il y a une grosse colère des salariés», explique Miranda Di Lorenzo, déléguée syndicale centrale CGT Monoprix, qui s’attend à un «mouvement de grève générale» assez suivi au sein de l’enseigne. Avec le 18 octobre comme date pivot ?