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Mobilisation

Dans les manifestations à la Réunion : «Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir»

A Saint-Denis et Saint-Pierre, les deux principales villes du département d’outre-mer, les cortèges ont rassemblé moins de monde que lors des journées de mobilisation record. Mais les opposants veulent continuer à mettre la pression au gouvernement, en attendant la décision du Conseil constitutionnel.
Une manifestation contre la réforme des retraites à Saint-Denis de la Réunion, le 15 mars dernier. (Richard Bouhet/AFP)
publié le 6 avril 2023 à 17h04

Diffusion de tracts dans des ronds-points, opération escargot sur les routes conduisant au chef-lieu, et énième manifestation à Saint-Denis et Saint-Pierre, les deux principales villes du département d’outre-mer… La mobilisation des Réunionnais s’est poursuivie ce jeudi, mais un cran en dessous des précédents mouvements. Les deux cortèges ont compté, selon les chiffres de la préfecture, 1 280 opposants à la réforme des retraites. Bien loin du «jeudi noir» qu’espérait l’intersyndicale locale. Et sans commune mesure avec les 10 000 manifestants qui avaient défilé dans le département le 31 janvier, selon les organisateurs, 7 300 selon la préfecture.

En cause, «les contraintes professionnelles, familiales et financières», estime Ida, syndiquée à la CFTC. Cette employée d’une centrale d’achat pour supermarchés, poursuit, elle, la lutte, convaincue que Macron peut encore revenir sur sa décision de retarder l’âge de départ à la retraite, malgré l’adoption du texte par le Parlement. Pascal, moniteur d’atelier dans un centre de travail spécialisé, veut lui aussi maintenir la pression, assurant que «les combats et la révolution dans la rue» ont fait la preuve de leur utilité dans le passé. Roger, ouvrier du BTP «fatigué de travailler depuis trente-quatre ans», renchérit : «Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir.»

«Maintenir la pression»

Un optimisme qui relève de la méthode Coué ? Marie-Hélène Dor, secrétaire départementale de la FSU, sait que la partie est loin d’être gagnée. La syndicaliste ne croit guère aux recours déposés devant le Conseil constitutionnel, même si, rappelle-t-elle, «plusieurs constitutionnalistes jugent que le véhicule législatif utilisé pour faire passer la loi n’était pas le bon». Son espoir réside davantage dans le référendum d’initiative partagée, que souhaite voir organiser la Nupes. Pour parvenir à une consultation des Français, il faudra, si le Conseil constitutionnel valide la demande, qu’environ 4,8 millions d’entre eux acceptent de s’engager, soit 10 % du corps électoral. «On est prêt à tout faire pour récolter ces signatures, promet Marie-Hélène Dor. Il faut maintenir la pression en attendant le référendum, parler aux Français, rester dans le rapport de force.»

Mais ce référendum, s’il avait lieu, ne pourrait se tenir avant neuf mois minimum, le délai nécessaire à la consultation. Bien trop long pour Didier Bourse, le porte-parole d’Attac Réunion, révolté par «cette crise démocratique» : «Ce qu’il faut, c’est empêcher la promulgation de la loi. C’est déjà arrivé avec le contrat première embauche (CPE) sous Chirac. Si la rue se bouge, on peut arriver au même résultat.» En fait, la loi sur le CPE avait bien été promulguée après son vote, en 2006, mais Jacques Chirac, alors président de la République, avait décidé de ne pas l’appliquer, après quatre mois de mobilisation populaire. En attendant, l’intersyndicale de la Réunion promet d’ici le 14 avril des «actions coups-de-poing» devant des grandes surfaces. Olivier, abrité du soleil de l’été austral sous un large chapeau de paille, approuve. «J’y crois encore, on tient bon», lance le directeur d’école.