«Désmicardiser la France», c’était la promesse formulée par Gabriel Attal lors de son arrivée à Matignon, en janvier. Une déclaration d’intention reprise ce lundi 23 septembre matin par la nouvelle ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, qui a affirmé lors de sa prise de fonctions que «le smic peut être un salaire d’entrée dans la vie active, mais ne doit pas être un salaire à vie», et rappelé que Michel Barnier, le nouveau Premier ministre, souhaite «revaloriser le travail».
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La réflexion est fondée sur un constat partagé aussi bien par le camp patronal que syndical : la multiplication des exonérations de cotisations sur les salaires au cours des dernières décennies, au nom de la sauvegarde de l’emploi, a contribué à faire stagner les rémunérations, notamment celles des personnes au smic ou juste au-dessus. Ainsi, comme l’a répété à de multiples reprises l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, pour qu’un salarié au salaire minimum ait 100 euros de plus «dans sa poche» par mois, il faut dans certaines situations que son employeur débourse au moins 400 euros. Le fait que la prime d’activité, par exemple, soit dégressive, entre en ligne de compte, mais pas seulement. Car si le smic est presque intégralement exonéré de cotisations pour l’employeur, ces dernières augmentent ensuite rapidement jusqu’à 1,6 smic. Puis, au-delà, d’autres exonérations persistent jusqu’à 2,5 smic puis 3,5 smic, sans que cela ait un effet notable sur l’emploi, selon la littérature scientifique. Le coût pour les finances publiques est massif : plus de 70 milliards d’euros en 2022, compensés en impôts divers. Le phénomène a été aggravé par l’inflation et le fait que le smic soit le seul salaire à la suivre, puisque de plus en plus de salariés se sont retrouvés smicards, permettant à leur employeur d’être exonéré de cotisations.
Système unique
Comment y remédier ? Gabriel Attal n’a pas mené le projet à terme, mais il a laissé à Michel Barnier une idée à mettre en œuvre dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui sera examiné cet automne. Inspirée par un rapport bouclé cet été par les économistes Antoine Bozio et Etienne Wasmer, qui ont été chargés d’une mission sur le sujet par Elisabeth Borne lorsqu’elle était à Matignon, celle-ci consisterait à mettre fin à l’empilement des dispositifs au profit d’un système unique. Celui-ci serait dégressif jusqu’à trois smic au lieu de 3,5 smic, rapportait AEF Info début septembre. Les économies réalisées sur les plus hauts salaires permettraient de lisser la courbe en accentuant les exonérations entre 1,2 et 1,9 smic. Le tout se ferait à coût constant. La question est désormais de savoir ce qu’en retiendra Michel Barnier – qui a par ailleurs nommé comme ministre délégué à l’Industrie Marc Ferracci, coauteur d’un rapport parlementaire sur la question avec le socialiste Jérôme Guedj. D’après les Echos, Antoine Bozio et Etienne Wasmer proposent également, dans leur rapport, des options qui permettraient d’engranger des recettes supplémentaires. De quoi allécher un Premier ministre en quête d’économies.