En parcourant le centre-ville de Romans-sur-Isère (Drôme), nul ne peut ignorer le culte que cette ville voue aux souliers. A l’angle d’une avenue, sur une place, au bord de la rivière… Onze chaussures géantes trônent fièrement, rappelant les créations des plus grands bottiers. Parmi elles, la derby tressée de Stéphane Kélian, l’escarpin à talon aiguille de Charles Jourdan ou encore la mule pince de Robert Clergerie. Toutes trois étaient fabriquées à Romans, en leur temps, et sont aujourd’hui exposées au musée de la Chaussure, à quelques encablures de ces sculptures.
Mais à Romans, la dernière usine encore debout, Clergerie, vit aujourd’hui ses dernières heures. Au milieu d’un quartier résidentiel de centre-ville, le bâtiment blanc de 4 000 m², sa toiture en dents de scie et son magasin aux portes closes sont les témoins d’un passé prospère. Ce décor, Valérie Treffé-Chavant le connaît par cœur. Depuis plus de 34 ans, c’est ici qu’elle vient chaque jour retrouver ses collègues, la famille Clergerie. «C’est toute une vie ! J’y suis entrée à la sortie de l’école, ma fille y travaille aussi… Cette fermeture, c’est une catastrophe», commente la syndicaliste CFE-CGC. A côté d’elle, sa collègue Sandrine Martorana, représentante FO, laisse échapper un soupir : «Ce qu’on craignait est arrivé… C’est tout un savoir-faire qui disparaît.» Comme elles, une cinquantaine de personnes ont appris ce mardi 8 avril qu’elles allaient perdre leur emploi.
«Les baskets, on n’a jamais su faire»
Une «déception» pour les