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«Il y a vraiment quelque chose qui monte» : transports, éducation, circulation… A quoi s’attendre le 10 septembre ?

Parti des réseaux sociaux, le mouvement «Bloquons tout» est difficile à cerner. Alors que plusieurs syndicats ont appelé à se joindre à la grève mercredi, «Libé» fait le point sur ce que l’on sait à ce stade des possibles actions.

A Marseille, le 2 septembre 2025. (Gerard Bottino/SOPA.SIPA)
Publié le 07/09/2025 à 7h57, mis à jour le 07/09/2025 à 10h52

La France sera-t-elle vraiment bloquée le 10 septembre ? A quelques jours de cette journée de mobilisation annoncée depuis plusieurs semaines, difficile de répondre à la question. Le mouvement social, parti des réseaux sociaux et donc en dehors des organisations traditionnelles, est «pluriel», reconnaît auprès de Libération Murielle Guilbert, la co-déléguée générale de l’union syndicale Solidaires, dont l’organisation a appelé à la grève mercredi 10 septembre. Ce qui le rend assez peu lisible dans ses revendications – hostilité au budget Bayrou, pouvoir d’achat, demande d’instauration du RIC, le référendum d’initiative citoyenne, etc. – comme dans ses possibles actions.

Si le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, se dit persuadé qu’il n’y aura «pas de mouvement d’ampleur», il s’attend quand même à des «actions spectaculaires». Les renseignements territoriaux reconnaissent également la difficulté d’anticiper ce que donnera ce mouvement «horizontal»«chacun fait ce qu’il veut» dans un contexte de «grogne et de colère», dixit une source sécuritaire citée par l’AFP. «Ce que l’on sent, c’est qu’il y a vraiment quelque chose qui monte. Il y a clairement un élan sur ce 10 septembre que l’on n’a pas senti depuis des mois en matière de colère sociale», abonde la syndicaliste.

Des secteurs de l’énergie à l’éducation, en passant par les transports et les banques, Libération fait le point sur ce que l’on sait pour le moment des perturbations à attendre.

Le ferroviaire et l’aérien divisés

La mobilisation s’annonce morcelée dans le secteur du rail. Alors que SUD rail, troisième syndicat des cheminots à la SNCF, a appelé dès la mi-août à faire grève le 10 septembre, les autres se concentrent surtout sur la semaine suivante. La CGT cheminots, l’Unsa ferroviaire et la CFDT cheminots, qui représentent à eux trois 70 % des votes aux dernières élections professionnelles, ont lancé un appel à la grève le 18 septembre… auquel ne s’est pour l’heure pas joint SUD rail. Seule la CGT cheminots, qui a longtemps tergiversé, appelle pour le moment à faire le doublé – 10 puis 18 septembre.

Dans le secteur aérien, le constat est similaire. Quand le SNCTA, le syndicat majoritaire chez les contrôleurs, appelle à faire grève le 18 septembre pour un «rattrapage intégral de l’inflation» en matière salariale, SUD aérien, qui représente l’ensemble des personnels du secteur, appelle à la grève et au blocage des aéroports le 10. Quant au Syndicat national des pilotes de ligne, première organisation de la profession, il n’a pour l’instant appelé à participer à aucun des deux mouvements. Chez Air France, la CGT prévoit un appel à la grève pour le 10 et le 18… quand FO et la CFDT ne visent que la journée du 18.

La RATP a le 18 septembre dans le viseur

Des métros qui marchent à plein régime mais des RER au ralenti ? A quelques jours du 10 septembre, un seul syndicat de la RATP a annoncé participer au mouvement social : La Base. Ce syndicat, qui est majoritaire chez les conducteurs de RER, a déclaré sur Facebook être «complètement en phase» avec les revendications du mouvement et a déploré le fait que «les centrales syndicales ne soient pas inscrites dans la mobilisation du 10 septembre afin de concentrer l’impact d’une journée morte de grève générale». Sans pour autant annoncer concrètement d’éventuelles actions.

Reste que La Base pourrait se retrouver seule mercredi : les quatre principaux syndicats de la régie de transports parisiens (la CGT, FO, Unsa mobilité et la CFE-CGC), ont de leur côté appelé à la grève le 18 septembre. Contactée par Libération, la RATP ne s’est pour l’heure pas avancée à des prédictions sur les perturbations. Elles devraient être publiées en début de semaine prochaine.

Blocages de routes et péages gratuits ?

Difficile de savoir à quoi s’attendre sur les routes le 10 septembre. Si les syndicats qui représentent le personnel autoroutier n’ont pas appelé à la grève, plusieurs collectifs, sur les réseaux sociaux notamment, ont déjà évoqué leur intention de perturber la circulation sur certains grands axes routiers ou lieux stratégiques. D’après certains messages postés sur les réseaux sociaux, des opérations «péages gratuits» pourraient avoir lieu à plusieurs endroits. Contacté, le groupe Vinci n’a pas donné suite à nos sollicitations.

Des blocages ou des barrages filtrants pourraient être installés sur certains ronds-points, comme cela avait été le cas des gilets jaunes. Le périphérique de Paris semble aussi être une cible. «Les blocages, on sait qu’il y en aura. Mais on n’en parle pas trop, pour avoir l’effet de surprise attendu, et parce que tous ne sont pas à l’initiative de syndicats», explique Murielle Guilbert de Solidaires.

Les taxis, qui ont pourtant mis un frein à leur mouvement entamé de longue date, pourraient aussi manifester sous les fenêtres du ministère du Travail, dans le VIIe arrondissement de Paris, selon le Monde.

Bruno Retailleau a déjà enjoint les préfets à mobiliser les forces de l’ordre afin d’empêcher toute «tentative de blocage des infrastructures essentielles à la vie de la Nation».

Dans le secteur de l’énergie, plusieurs préavis déposés

CGT Mines-Energie, électriciens, gaziers, salariés d’EDF, de la chimie… Dans le secteur de l’énergie, les appels à la mobilisation le 10 septembre sont nombreux. Plusieurs mobilisations pourraient être organisées, comme des blocages de raffineries, d’incinérateurs ou de dépôts pétroliers. Cela pourrait même entraîner une baisse de la production énergétique du pays.

La CFE Energies a en revanche refusé de participer au mouvement, renvoyant vers le 18 septembre. En cause, selon un communiqué publié le 3 septembre : des revendications qui ne seraient pas assez précises et un manque de «propositions claires à négocier».

Dans les banques et commerces, le grand flou

C’est l’une des possibles actions qui revient beaucoup sur les réseaux sociaux dans le cadre du 10 septembre : celle de s’en prendre de manière globale à l’économie française. Beaucoup appellent ainsi à faire une «grève de la carte bleue», parfois le temps d’une journée, parfois plus encore, pour mettre la pression sur les banques en leur faisant perdre les commissions prélevées à chaque paiement. D’autres appellent plus globalement à un boycott de la consommation, des magasins aux grandes plateformes d’e-commerce. Ou encore à des opérations «chariot de courses gratuit». Impossible pour l’heure de savoir si ces appels, qui échappent à toute organisation, seront suivis.

Dans l’éducation, profs et étudiants mobilisés… sur le papier

Des établissements bloqués mercredi ? L’Union syndicale lycéenne (USL) a appelé au blocus des établissements le 10 septembre et souhaite «construire la mobilisation dans la durée», dénonçant notamment une politique «destructrice» pour l’éducation. Le député LFI Louis Boyard, ex-président de l’Union nationale lycéenne (l’ancien nom de l’USL), souhaite également des blocages dans les lycées et les universités. Rien ne dit toutefois que les élèves embrayeront, a fortiori dans les facs qui sont encore en période de prérentrée.

Du côté des enseignants, Sud éducation, le Snes-FSU et certaines fédérations du FSU-Snuipp appellent à une mobilisation mercredi. Contacté jeudi, le ministère de l’Education assure n’avoir pour l’heure «pas encore de visibilité» sur l’ampleur de la mobilisation attendue. Les agents de l’administration ont jusqu’à quarante-huit heures pour prévenir leur hiérarchie de leur intention de participer à la grève. Le mouvement pourrait être davantage suivi le 18 septembre dans les établissements scolaires.