«On veut vivre, pas survivre», le slogan de SUD Solidaires retraités s’affiche sur les sacs en bandoulières d’une poignée de manifestants du syndicat. Mardi 24 octobre, des rassemblements étaient organisés dans plusieurs villes de France par neuf organisations syndicales et associatives, dont la CGT, la FSU, SUD Solidaires, la CFE-CGC et FO, pour réclamer 10 % d’augmentation immédiate des pensions de retraite en 2023. A Paris, ils étaient environ 150 à s’être réunis en début d’après-midi près de l’Assemblée nationale. «Les retraités ne sont pas des nantis !» entonne Laurence Naudin, porte-parole de la CFTC.
Fin septembre, Bruno Le Maire a certes annoncé une revalorisation des retraites de base de 5,2 % au 1er janvier 2024. Le ministre de l’Economie assure «protéger tous les retraités contre l’inflation». Mais cette augmentation, qui ne fait que suivre le cadre légal, est loin d’être suffisante pour les manifestants. «Compte tenu des pertes cumulées depuis le 1er janvier 2017, nos pensions de retraite de base et complémentaires ont perdu environ 10 % et le décalage est encore supérieur par rapport au Smic ou au salaire mensuel de base, pointe la CGT Retraités dans son communiqué. Afin de remettre à niveau les pensions de retraite, c’est une revalorisation de 10 % qui est nécessaire.»
Gisèle, retraitée de 74 ans et ancienne fonctionnaire aux finances a fait ses calculs : «Les 5,2 % d’augmentation des retraites sont plafonnées. En réalité, ça ne dépassera pas les 70 euros. Ce n’est pas assez pour moi, mon loyer représente un tiers de mes revenus. Je fais toujours attention.» La revalorisation annoncée par le ministre de l’Economie ne concerne en effet que la retraite de base, dont le montant ne peut pas dépasser 50 % du plafond de la sécurité sociale (1 833 euros brut par mois en 2023).
«Certains retraités vivent en dessous du seuil de pauvreté»
Dans les rangs du rassemblement, beaucoup de retraités disent manifester pour les autres. Ceux qui n’ont pas pu se déplacer. Catherine Delhostal, ancienne salariée à la Banque de France et Catherine Fayet, ex-infirmière, toutes deux bénévoles à Solidaires Retraités et Retraitées s’engagent pour les pensionnaires plus précaires : «Certains retraités vivent en dessous du seuil de pauvreté», rappellent-elles. Selon les dernières données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques publiées en 2023, le niveau de vie médian des retraités est légèrement supérieur à celui de l’ensemble de la population et le taux de pauvreté des retraités est nettement plus faible que celui de l’ensemble de la population (8,7 % contre 14,6 % en 2019). Les deux retraitées insistent toutefois sur la situation de grande pauvreté de certains, avec «des queues aux Restos du cœur et au Secours catholique remplies. Ils sont de plus en plus à arrêter de payer leur mutuelle.»
C’est le cas de Jean-Baptiste Reddé, 66 ans, ancien instituteur : «Je ne peux pas me soigner. Les honoraires coûtent trop cher. Dès le milieu du mois, je fais les fonds de tiroir.» Avec son bonnet bleu à rayures rouges et ses lunettes de soleil, il porte fièrement sa pancarte à double message : «Retraite de luxe des sénateurs pour nous aussi» d’un côté et «Augmentez les pensions» de l’autre. D’autres s’inquiètent du coût d’un Ehpad pour leurs vieux jours. Catherine Fougère, 77 ans et ancienne fonctionnaire au CNRS affirme : «On fait souvent la distinction entre les retraités pauvres et les nantis. Mais nous sommes nombreux à ne pas pouvoir payer un Ehpad, c’est trop cher.» Les retraités qui manifestent ont aussi en tête le sort des salariés qui, eux, ne bénéficient pas d’une revalorisation générale. C’est pour cette raison que Laurence Naudin réclame «également une augmentation de 10 % pour les salariés du public et du privé».