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Le Libé des historiens

Penser les solidarités populaires comme moyen d’émancipation

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Pour lutter contre la misère, les citoyens organisent depuis le XIXe des réseaux d’entraides pour les plus pauvres. Mais, sous l’appellation «allocations», devenu un gros mot, les solidarités sont désormais pointées du doigt.
Sara Aroua, auxiliaire de vie, chez un de ses bénéficiaires, Georges, 84 ans. A Aigurande dans l'Indre, en juin 2022. (Valérie Couteron/Grande commande BNF)
par Ludivine Bantigny, ex-maîtresse de conférences, professeure en collège
publié le 4 octobre 2023 à 23h38

A l’occasion des «Rendez-vous de l’histoire», qui se tiennent à Blois du 4 au 8 octobre, la rédaction de Libération invite une trentaine d’historiens et historiennes pour porter un autre regard sur l’actualité. Retrouvez ce numéro spécial en kiosque jeudi 5 octobre et tous les articles de cette édition dans ce dossier.

«On a besoin de parents qui puissent être fiers de rentrer le soir et de raconter leur journée de travail à leurs enfants et de ne pas leur expliquer qu’on vit en France des allocations», a déclaré mardi 3 octobre, sur LCP, la députée Renaissance Fanta Berete. Voilà donc accolées la fierté, et par là même la dignité, à l’emploi ; et par contraste l’idée qu’il faudrait avoir honte de recevoir des aides sociales. Ces assertions stigmatisantes entrent en contradiction avec une longue histoire de solidarités populaires, marquée par la tradition de la pratique de l’association pour lutter contre la misère et la détresse sociale qu’elle engendre – une détresse parfois meurtrière.

Fontaine et four à pain

Cette tradition remonte au premier XIXe siècle, quand sont apparues les sociétés de secours mutuel pour faire face à la pauvreté en partie née de la révolution industrielle. Forgée dans le monde artisan et ouvrier, cette forme d’association permettait aux plus vulnérables de tenir bon, sans condescendance humiliante, par une coopération ravivant l’entraide