Bataille de chiffres entre la CGT et le gouvernement. Battant en brèche le discours parfois mirifique de l’exécutif sur la réindustrialisation du pays, le syndicat dirigé par Sophie Binet a fait ses comptes dans les plans de licenciement annoncés en France. Il recense, depuis septembre 2023, 33 021 emplois «supprimés ou fortement menacés», dont près de la moitié dans l’industrie. Un chiffre que la CGT met en regard avec les annonces récentes du gouvernement. Lors du dernier sommet Choose France, lundi 13 mai, celui-ci était ravi d’annoncer plus de 15 milliards d’euros d’investissements étrangers, un montant record, avec à la clé un potentiel de 10 000 emplois créés.
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«Choose France, c’est l’arbre qui cache la forêt de la dernière saignée industrielle que nous sommes en train de vivre», a taclé ce mercredi 22 mai Sophie Binet, lors d’une conférence de presse de présentation des «Etats généraux de l’industrie et de l’environnement» organisés par son syndicat, le 28 mai prochain. Elle souligne notamment l’augmentation de 15 % des licenciements économiques lors du premier trimestre, tous secteurs confondus, selon la dernière étude publiée par le ministère du Travail.
«Au moins 60 000 emplois affectés»
La numéro 1 de la CGT estime aussi que les investissements annoncés lors de Choose France «sont de très courte durée et ont un effet très incertain sur l’emploi», et met sciemment en balance ces chiffres avec les emplois supprimés ou menacés depuis septembre. Industrie chimique, métallurgie, agroalimentaire, commerce… Selon une estimation présentée comme «très prudente», la CGT a relevé quelque 130 plans de licenciements, représentant 33 021 emplois directs supprimés ou «fortement menacés». «En intégrant la sous-traitance et l’intérim, on peut évaluer à au moins 60 000 le total des emplois affectés, 60 000 familles plongées dans la précarité», déplore Sophie Binet.
Les annonces de Choose France «ont d’ores et déjà beaucoup de plomb dans l’aile», estime Sophie Binet, qui fustige des emplois «créés à grand renfort d’argent public». «Malgré les cocoricos de l’exécutif, notre secteur manufacturier représente toujours à peine 10 % du PIB, bien loin de la moyenne européenne et de celle des pays de l’OCDE», pointe-t-elle.
Lors du dernier salon Global industrie, fin mars, Bruno Bonnell, secrétaire général pour l’investissement chargé de France 2030, avait déploré des financements privés «à la traîne de l’Etat» : «Quand l’Etat met un, l’industrie met quatre, or elle devrait mettre huit» pour que la réindustrialisation fonctionne, avait regretté ce membre de la majorité présidentielle.