Encore raté. Trois ans que le déficit de la Sécu se résorbait après le gouffre créé par le Covid. Il était passé de 39,7 milliards d’euros en 2020 à 8,8 milliards cette année, grâce aux moindres dépenses de crise et à la reprise économique. Mais c’est fini. Le déficit des régimes de base de la Sécurité sociale et du fonds de solidarité vieillesse se creusera à nouveau à partir de l’an prochain, à 11,2 milliards, pour quasiment doubler d’ici à la fin du quinquennat, à 17,5 milliards en 2027. Ce sont en tout cas les prévisions inscrites dans le projet de loi de financement de Sécurité sociale pour l’an prochain, présenté mercredi 27 septembre en Conseil des ministres, et qui sera débattu cet automne au Parlement.
«Contexte de tensions»
Les perspectives se sont dégradées par rapport à ce que le même gouvernement avait inscrit dans sa loi rectificative de financement de Sécurité sociale, en avril, ce texte par lequel il a fait passer sa réforme des retraites. Pour cette année, le déficit s’est creusé de 600 millions d’euros par rapport à la prévision du printemps. Pour l’an prochain, c’est 1,4 milliard de plus. Le gouvernement justifie ces révisions par l’inflation. Il revoit aussi à la hausse par rapport à avril l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam) : 2,8 milliards d’euros de plus que prévu, à 247,6 milliards pour cette année, en raison, explique-t-il entre autres, «du dynamisme des indemnités journalières» (versées lors des arrêts maladie), «du fait notamment du contexte d’inflation et de ses répercussions sur les salaires» ou encore «de l’effet des revalorisations des rémunérations des personnels en établissements sanitaires et médico-sociaux annoncés en juin», soit les revalorisations des salaires et des gardes de nuit et de week-end à l’hôpital. Pour l’an prochain, le gouvernement table sur un ralentissement de cet Ondam (qui augmenterait de 3,2% après une hausse de 4,8% hors Covid cette année).
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Cette trajectoire semble encore bien ambitieuse au Haut Conseil des finances publiques. L’organisme indépendant placé auprès de la Cour des comptes et chargé d’apprécier le réalisme des prévisions de recettes et de dépenses publiques du gouvernement estime, dans un avis, que ce net ralentissement suppose «un infléchissement de la tendance spontanée des soins de ville, qui semble optimiste, et un volant d’économies de 3,5 milliards d’euros», rappelant qu’un «tel montant d’économies a déjà été atteint par le passé, mais paraît plus difficile à réaliser dans un contexte de tensions, notamment dans le secteur hospitalier et sur l’offre de médicaments».
«Effet de la revalorisation»
Et ce n’est pas la réforme des retraites qui participera dans l’immédiat à équilibrer les comptes. Le gouvernement évoque «ses effets graduels». En réalité, elle creuserait le déficit à la fois cette année et l’année prochaine : «En 2024 comme en 2023, [elle] coûterait plus qu’elle ne rapporte (coût de 2,2 milliards d’euros pour des économies de 2 milliards d’euros) essentiellement sous l’effet de la revalorisation des petites pensions.» Ce n’est pas l’intersyndicale qui le dit dans un communiqué, mais… le Haut Conseil des finances publiques.