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Reportage

Précarité alimentaire : aux «Tables du ramadan» à Saint-Denis, «avoir autant de monde dès le début, ça n’était jamais arrivé»

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Au premier jour de son dispositif de restauration solidaire mis en place pour la période du ramadan, le Secours islamique France a distribué lundi 11 mars au soir plus d’un millier de repas. Une foule nombreuse et diversifiée, qui témoigne de l’explosion de la précarité alimentaire, en Seine-Saint-Denis comme dans le reste du pays.
Dans le centre-ville de Saint-Denis, lundi 11 mars au soir, pour le premier jour de distribution de repas des «Tables du ramadan». (Denis Allard/Libération)
par Samuel Ravier-Regnat et Photos Denis Allard
publié le 12 mars 2024 à 13h29

Il est bientôt 19 heures, ce lundi 11 mars à Saint-Denis, et déjà une foule compacte patiente nerveusement à l’entrée du chapiteau blanc installé sur le boulevard Anatole-France, à deux pas de la nationale et de la bouche de métro. C’est le premier jour du ramadan. Comme presque tous les ans depuis 2011, le Secours islamique France (SIF) organise pour l’occasion une vaste distribution alimentaire, les «Tables du ramadan», ouverte à tous : pendant un mois, des repas sont servis gratuitement, à l’heure de rupture du jeûne, à ceux qui se présentent devant le barnum. En 2023, l’ONG a préparé quelque 33 000 rations au total, avec des pics journaliers à près de 1 500. Mais les premières journées étaient plus tranquilles. «Avoir autant de monde dès le début, ça n’était jamais arrivé. Généralement, il fallait un peu de temps, avec le bouche à oreille, pour que les gens soient au courant», souffle Léo André, responsable de mission au SIF.

Avec ses centaines de tables identiques et l’agitation bruyante qui y règne, le chapiteau a des airs de réfectoire scolaire. Il y a surtout des hommes, seuls ou en groupe. Nombre d’entre eux vivent dans la rue, en Seine-Saint-Denis ou ailleurs en Ile-de-France. Farès (1), sexagénaire à la bouche édentée, dort depuis cinq ans dans le quartier voisin de La Plaine, en attendant de collecter l’argent nécessaire à un retour dans sa Tunisie natale. Et évacue les questions avec philosophie : «La misère, on s’y habitue. Avec les amis et les associa