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Libération
Témoignage

Révolte dans les quartiers : à Gennevilliers, «la misère s’installe, et la réponse n’est pas là»

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Ancien ouvrier de chez Citroën arrivé du Maroc en 1973, Abdallah Moubine livre son regard sur les nuits de violences qui ont fait suite à la mort de Nahel, et sur ces «jeunes qui ne croient plus en rien».
Près du commissariat de Gennevilliers (Hauts-de-Seine), jeudi 29 juin. (Pierrick Villette/Abaca)
publié le 5 juillet 2023 à 6h41

D’abord on s’est assis, puis on les a vues, les grandes planches en bois qui comblent l’ouverture béante laissée par la disparition d’une partie de la vitrine. Le bar-tabac de Gennevilliers (Hauts-de-Seine) où l’on a rendez-vous, lundi 3 juillet en fin de matinée, a été vandalisé au cours d’une des nuits qui ont agité la commune après la mort du jeune Nahel, 17 ans, tué par un policier à Nanterre, non loin de là, dans le même département. Une partie de la devanture a été détruite. A l’intérieur, «ils se sont servis», relate la patronne, l’air légèrement blasé, en désignant le comptoir où tout semble revenu en ordre, si ce n’était un coin du revêtement simili-marbre un peu défoncé.

Mais pourquoi ces «ils» s’en sont-ils pris à ce troquet du coin ? «Il faut poser la question aux casseurs !» dit en riant Abdallah Moubine. La première fois qu’on a rencontré cet ancien ouvrier spécialisé (OS) de Citroën, qui a travaillé quarante-trois ans dans l’usine du constructeur automobile à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), c’était en 2016, pour évoquer les grandes grèves qui avaient secoué les usines de Peugeot, Citroën et Talbot au début des années 80. Syndiqué à la CGT, Moubine nous avait expliqué que ces luttes avaient eu pour fonction première de retrouver de «la dignité». On a repensé à lui