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Désindustrialisation

Sophie Binet propose de muscler la loi «Florange» qui contraint les grosses entreprises qui veulent fermer un site à chercher un repreneur

Dans un contexte de multiplication des plans sociaux, la secrétaire générale de la CGT suggère au gouvernement d’étendre la recherche d’un repreneur à toutes les entreprises de plus de 50 employés, et pas seulement à celles de plus de 1 000 salariés.
La secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, à Paris, le 17 mai 2023. (Albert Facelly/Libération)
publié le 27 novembre 2024 à 15h55

Face à l’hiver social qui s’annonce et à la désindustrialisation, Sophie Binet a peut-être une piste pour le gouvernement : renforcer la loi dite «Florange» du 29 mars 2014. Soutenue à l’époque par le ministre du Redressement productif de François Hollande, Arnaud Montebourg, celle-ci contraint les entreprises de plus de 1 000 salariés qui veulent fermer un site à chercher un repreneur – sans pour autant le forcer à accepter les offres qui lui sont soumises. Elle contraint également les directions à informer et consulter le comité social et économique (CSE) sur les offres éventuelles de reprise et sur les projets de fermeture. Dans un entretien aux Echos paru ce mercredi matin, la secrétaire générale de la CGT, suggère notamment d’abaisser drastiquement ce seuil «aux entreprises de 50 salariés ou plus», qui en sont aujourd’hui exclues. «Une mesure urgente à prendre», presse-t-elle, dans un contexte «d’accélération très forte de la dégradation de la situation» en matière de plans sociaux.

La responsable de la CGT suggère aussi d’obliger «les directions à informer [la banque publique d’investissement] BpiFrance de tout projet de fermeture de site» et que celle-ci «puisse être aussi saisie par les représentants du personnel». Considérant que la loi Florange, «ne permet pas d’empêcher que certaines entreprises préfèrent fermer leur site plutôt que de la céder à la concurrence», elle juge aussi «nécessaire de renforcer les sanctions» en cas de fermeture d’un site et que les représentants des salariés aient aussi «leur mot à dire sur les projets de reprise».

Une loi issue de la lutte des salariés d’ArcelorMittal à Florange

La loi du 29 mars 2014 découlait d’une promesse de campagne de François Hollande, en 2012. Elle s’était concrétisée après l’exceptionnelle lutte syndicale des salariés des hauts fourneaux ArcelorMittal de Florange (Lorraine), il y a dix ans. A la suite de l’accession à l’Elysée du candidat socialiste, leur combat avait été au centre de l’attention politique et médiatique car le site, un des plus rentables du géant de l’acier, était pourtant promis à la fermeture. A tel point que le gouvernement avait un temps envisagé une nationalisation, avant de se rétracter.

Outre la disposition obligeant les entreprises à chercher un repreneur, le texte adopté par l’Assemblée nationale prévoyait aussi des pénalités pour la fermeture d’un site rentable qui pouvaient atteindre jusqu’à vingt fois la valeur mensuelle du smic par emploi supprimé. Mais cette disposition avait été censurée par le Conseil constitutionnel au motif qu’elle faisait «peser sur les choix économiques de l’entreprise […] des contraintes qui portent une atteinte inconstitutionnelle au droit de propriété et à la liberté d’entreprendre».

Dans une tribune publiée mercredi dernier par Libération, deux responsables syndicaux de la papeterie de Stenay (Meuse), entreprise liquidée au début du mois, suggèrent, eux, de renforcer cette loi en obligeant «les repreneurs à présenter un projet industriel sérieux et viable, avec des garanties d’investissement et de maintien de l’emploi». Le Premier ministre, Michel Barnier, qui doit annoncer des mesures d’urgence pour l’industrie vendredi tendra-t-il l’oreille ?