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Libération
Gueule de bois

Taxes américaines : les alcools français redoutent un recul des exportations de 800 millions d’euros

Annoncée par Washington le mercredi 2 avril, la hausse des droits de douane sur les produits en provenance de l’Union européenne inquiète les producteurs de vins et spiritueux. Les Etats-Unis sont leur plus gros marché d’exportation.
Le marché américain représente près de 25 % des produits viticoles exportés sous indications géographiques (AOC et IGP). (Idriss Bigou-Gilles/Hans Lucas)
publié le 3 avril 2025 à 9h29

C’est une possible hécatombe pour le secteur. La filière française des vins et spiritueux craint un recul d’environ 800 millions d’euros d’exportations pour les entreprises de l’Hexagone à cause des droits de douane de 20 % imposés aux marchandises de l’Union européenne par l’administration Trump mercredi 2 avril. La menace brandie par Trump de taxes américaines à hauteur de 200 % n’a finalement pas été au bout. Mais la Fédération française des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS) juge tout de même que la décision des Etats-Unis d’appliquer un droit de douane général de 20 % sur tous les produits importés de l’Union européenne «entraînera des conséquences extrêmement lourdes sur le secteur des vins et spiritueux français et européens», et «aura également un impact extrêmement négatif sur les importateurs, grossistes et détaillants américains».

En France, «on peut craindre un recul des exportations d’environ 800 millions d’euros, ce chiffre passant à 1,6 milliard pour l’UE-27. Un tel recul aura un impact énorme sur l’emploi et l’économie du secteur», déplore la fédération. En 2024, la France a exporté quelque 2,4 milliards d’euros de vin et 1,5 milliard de spiritueux aux Etats-Unis, son premier marché à l’exportation (25 %). De son côté, la Confédération nationale des appellations d’origine contrôlées (CNAOC) estime à «plusieurs centaines millions d’euros pour la filière» l’impact des nouvelles taxes douanières américaines, rappelant que le marché américain représente près de 25 % des produits viticoles exportés sous indications géographiques (AOC et IGP).

Eliminer «les droits de douane»

Pour les eaux-de-vie (Cognac et Armagnac), «c’est une catastrophe d’une ampleur inimaginable. En addition du conflit avec la Chine, ces taxes vont mettre en très grande difficulté notre filière, avec un risque de cessations d’activité en chaîne en Charentes notamment», souligne Anthony Brun, vice-président de la CNAOC et président de l’Union générale des viticulteurs pour l’AOC Cognac, cité dans le communiqué. Sur un ton appelant elle aussi à l’apaisement, l’organisation SpiritsEurope «regrette que les spiritueux européens soit touchés par ces droits de douane», relevant que le secteur «soutient de nombreux emplois des deux côtés» de l’Atlantique.

«Nous voulons nous assurer d’un retour à un environnement offrant une croissance continue à la fois pour les producteurs européens et américains», plaide le lobby européen des spiritueux, qui «salue le désir de l’UE d’atteindre une solution négociée». De son côté, la FEVS appelle à favoriser «l’accès équitable et réciproque aux vins et spiritueux par l’élimination des droits de douane des deux côtés de l’Atlantique».

Concernant les alcools européens, Donald Trump avait menacé de passer ses surtaxes à 200 % si l’UE incluait le bourbon et les whiskys américains dans sa liste de rétorsions, comme elle l’envisageait, ensemble de biens et services qu’elle menaçait de taxer en retour. Depuis, Bruxelles a reporté à la mi-avril la publication de ce document. De leur côté, les représentants du secteur appellent l’Union européenne à laisser le bourbon et plus généralement leur activité hors du conflit. D’ailleurs, depuis un accord UE-USA de 1997, les spiritueux sont exonérés de droits douaniers de part et d’autre de l’Atlantique. Les exportateurs français proposent aujourd’hui d’en faire de même pour les vins, encore soumis à de faibles taxes.