Le groupe Renault vit décidément une période aussi tourmentée que paradoxale. Côté positif, des ventes tellement en progrès en France qu’elles surclassent désormais le surpuissant Stellantis et ses 14 marques, des modèles électriques encensés par la presse spécialisée et les automobilistes, des résultats financiers très bons en 2024. Côté négatif, le départ surprise de Luca De Meo annoncé mi-juin. Et ce mercredi 16 juillet, une dégringolade en Bourse (-17,6 %) après un «profit warning» (avertissement sur résultats) balancé mardi soir… soit le dernier jour de Luca De Meo à la tête de la boîte. Le directeur financier et désormais directeur général par intérim, Duncan Minto, 50 ans, l’assure : les deux événements ne sont pas liés.
Sur le papier, l’affaire ne semble pas si dramatique pour le constructeur français. La marge opérationnelle ne devrait plus être de 7 % ou plus du chiffre d’affaires mais autour de 6,5 %. Une révision due à la «détérioration de la dynamique du marché automobile», a précisé mardi Duncan Minto. Sauf que la tendance des ventes, «légèrement en deçà des attentes» en juin, devrait se poursuivre au second semestre, dans le sillage d’un marché de l’automobile atone, notamment en Europe.
Le chiffre d’affaires du constructeur français (Renault, Dacia, Alpine) a pourtant atteint 27,6 milliards d’euros au premier semestre (+ 2,5 % sur un an). Mais la marge opérationnelle, très observée par les actionnaires, n’a atteint que 6 %. Les flux de trésorerie disponibles, eux, sont tombés à 47 millions d’euros mais c’est plutôt pour une bonne raison : les usines tournent à 90 % de leur capacité en moyenne. Les flux de trésorerie disponibles (free cash-flow) devraient être compris fin 2025 entre 1 et 1,5 milliard d’euros, contre 2 milliards d’euros ou plus prévus précédemment. Les stocks de voitures, qui avaient notamment causé la perte de l’ex-patron de Stellantis Carlos Tavares l’an dernier, sont en revanche «en hausse» sur six mois, avec 530 000 véhicules à fin juin.
Un plan de réduction des coûts «renforcé»
«C’est dommage d’être à 6 %. Nous nous attendions à un peu plus haut au premier semestre, a déclaré Duncan Minto au cours d’un appel avec les analystes financiers. Mais nous parlons toujours d’une dynamique positive dans la seconde moitié de l’année.» Pour rebondir, Renault va «renforcer» son plan de réduction des coûts, qui comprend notamment une baisse des frais généraux et administratifs mais aussi des coûts de production et recherche et développement, a indiqué Duncan Minto. De là à imaginer de nouvelles suppressions d’emplois ? Le groupe a perdu des dizaines de milliers de postes à travers le monde depuis 2019 - 8 000 de moins, pour l’Hexagone seulement, sur la période. Les syndicats devront attendre le 31 juillet, lors de la présentation complète de ses résultats semestriels, pour avoir plus de précisions.
Du côté de la direction, le processus de nomination du nouveau directeur général «se déroule très normalement» et «ne devrait pas durer longtemps», a assuré Duncan Minto. Puisque pour certains, le salut vient toujours d’en haut, nul doute que les «investisseurs» combleront lors de l’annonce du successeur une partie des pertes en Bourse de ce mercredi. Surtout si la direction officialise de nouvelles destructions d’emplois.