La Cour de cassation a rendu ce mercredi la première décision en France sur le délai de prescription pour les poursuites au civil dans l’affaire du «dieselgate», ouvrant la voie à de nouvelles actions en justice, et s’appuyant pour la première fois sur la Charte de l’environnement. Le propriétaire d’un véhicule touché par ce vaste scandale où les plus grands constructeurs sont suspectés d’avoir truqué des moteurs pour passer les contrôles antipollution peut contester l’achat pendant cinq ans après avoir été informé du défaut, et pas seulement cinq ans après l’achat, a décidé la Cour de cassation, préparant le terrain à de nouvelles poursuites.
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La plus haute instance juridique française a tranché pour la première fois sur la prescription en donnant raison, face à Volkswagen, à l’acheteur d’un véhicule qui avait été informé du trucage de son moteur plus de cinq ans après son acquisition, a-t-elle indiqué dans un communiqué. «C’est une décision très importante, historique», a commenté pour l’AFP Me Hugo Delage, dont le cabinet représente le consommateur qui a fait l’objet de cet arrêt.
«Manquement grave»
Le constructeur allemand avait reconnu en 2015 avoir commercialisé plus de 11 millions de véhicules équipés d’un logiciel qui permettait de truquer les données concernant les émissions. Il avait ensuite dû en informer les propriétaires concernés.
La Cour de cassation a décidé mercredi que «l’acquéreur était encore dans les temps» quand il a saisi la justice, ce que contestait Volkswagen, «le délai de cinq ans ayant commencé à courir non pas à la livraison du véhicule, mais à la réception du courrier l’informant de l’opération de rappel». La justice a traité plusieurs procédures similaires de détenteurs de voitures aux moteurs truqués, mais tous les tribunaux ne s’accordaient pas sur la date à laquelle débutait la prescription.
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La cour reconnaît par ailleurs que le défaut de conformité est suffisamment grave pour faire annuler la vente. «Lorsqu’un véhicule est équipé d’un logiciel destiné à tromper les mesures européennes antipollution, le contrat de vente peut être anéanti pour manquement grave du vendeur à son obligation de délivrance d’un bien conforme», explique-t-elle. «Si un simple trucage du logiciel conduit à la remise en cause de la vente, que dire si le défaut de conformité affecte le moteur ou un élément de sécurité ?» se réjouit pour l’AFP l’avocat Christophe Leguevaque, qui porte plusieurs actions collectives dans l’automobile.
Déjà quatre procès
La cour a en outre rendu sa décision en s’appuyant pour la première fois sur la Charte de l’environnement. Ce texte de 2004 «prévoit que chaque personne a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé», et «le devoir de prendre part à la préservation et l’amélioration de l’environnement», rappelle le communiqué.
Dans ce vaste scandale du dieselgate, quatre procès ont pour l’heure été requis en France par le parquet de Paris pour tromperie, visant Volkswagen, Peugeot-Citroën, Renault et Fiat-Chrysler.
Si la décision en cassation permet, en principe, de nouvelles actions de la part de propriétaires de véhicules truqués, il n’est pas forcément dans leur intérêt d’agir individuellement car «il y a déjà une action de groupe qui vise à obtenir l’indemnisation de tous les consommateurs français», rappelle Me Delage.