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Industrie

Eramet suspend son projet d’usine de recyclage de batteries électriques dans le nord de la France

A l'heure de la transition écologiquedossier
Face à un marché européen des voitures électriques à la peine, le groupe français a annoncé ce jeudi 24 octobre mettre sur pause son projet d’usine à Dunkerque pour détruire des batteries lithium-ion et en récupérer les métaux rares. «Ce n’est pas un renoncement», a martelé la ministre Agnès Pannier-Runacher.
L'ombre de Christel Bories, directrice générale d'Eramet, lors de l'inauguration d'une usine de recyclage des batteries des voitures électriques à Trappes, le 14 novembre 2023. (Gonzalo Fuentes/REUTERS)
publié le 24 octobre 2024 à 11h49
(mis à jour le 24 octobre 2024 à 11h50)

C’est un coup de frein pour les ambitions françaises de souveraineté industrielle. Le groupe minier hexagonal Eramet a annoncé ce jeudi 24 octobre sa décision de «suspendre» son projet d’usine hydrométallurgique de recyclage de batteries pour véhicules électriques prévu à Dunkerque (Nord), «dans l’attente d’un modèle économique solide et pérenne en Europe». «Faute de montée en puissance en Europe des usines de batteries et de leurs composants, il existe aujourd’hui de fortes incertitudes, à la fois sur l’approvisionnement en matières premières de l’usine et sur les débouchés des sels métalliques issus du recyclage», explique Eramet dans un communiqué.

La PDG du groupe, Christel Bories, a souhaité justifier cette décision lors d’une conférence téléphonique à la presse : «Nous restons totalement convaincus de la nécessité de développer une économie circulaire des métaux critiques sur le sol européen, dont le recyclage des batteries en fin de vie sera un élément clé de la chaîne de valeur future, mais la réalité est que la chaîne de valeur des batteries électriques en Europe connaît un démarrage très difficile». «Compte tenu de la très lente montée en puissance des usines de batteries, nous ne sommes pas en mesure de sécuriser des approvisionnements en matière première pour alimenter notre projet d’usine, a-t-elle ajouté.

En attendant d’avoir des batteries en fin de vie, le projet d’usine misait sur une alimentation venue essentiellement des chutes de production des nouvelles usines de batteries en train de sortir de terre dans le nord de la France. Christel Bories a notamment évoqué les «problèmes» des fabricants de batteries NorthVolt ou d’ACC, et les «nombreux reports de projets sur la chaîne de valeur batteries».

Par ailleurs, «en aval», a-t-elle ajouté, «il n’y a aucun projet de précurseur de cathode européen qui a été confirmé, donc il n’y a pas de client (en Europe) pour les sels métalliques issus du recyclage». «Si aujourd’hui on faisait des sels (de nickel, de cobalt ou de lithium, ndlr) issus du recyclage, on devrait les vendre en Asie. Cela ne fait pas de sens de recycler sur le marché européen pour vendre le produit en Asie», a-t-elle affirmé.

«Ce n’est pas un renoncement, c’est une suspension»

La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a voulu se montrer rassurante ce jeudi matin sur France Info, garantissant que «ce n’est pas un renoncement, c’est une suspension». La conséquence, selon elle, d’un marché des voitures électriques «un peu freiné en Europe» et de «la politique allemande qui a fait le choix l’année dernière de réduire drastiquement leur soutien à l’électrification».

Le projet d’Eramet, en lien avec le groupe Suez - en toute vraisemblance à Dunkerque ou dans les environs - porte sur la construction de deux usines : l’une de tri et broyage de batteries usagées ou chutes de production pour fabriquer un composant connu sous le nom de «blackmass» contenant des sels minéraux mélangés, et l’autre de séparation de ces sels destinés à des équipementiers de la chaîne industrielle des batteries. Le 14 novembre dernier, Eramet et Suez avaient inauguré en présence d’Agnès Pannier-Runacher, alors ministre de la Transition énergétique, une usine pionnière du recyclage des batteries des voitures électriques à Trappes.