Menu
Libération
Rallonge

Fin des moteurs thermiques en 2035 : pour le patron de Renault, il faut de la «souplesse dans le calendrier»

Le directeur général, Luca de Meo, a affirmé aux «Echos» à paraître ce lundi 22 juillet qu’il estimait que le marché n’était «pas encore sur la bonne trajectoire», considérant qu’il aurait mieux valu «viser 2040».
Usine Renault à Sandouville (Seine-Maritime), le 29 mars 2024. (Lou Benoist/AFP)
publié le 22 juillet 2024 à 9h08

La «Renaulution» d’accord, mais piano, piano. Alors que le directeur général de Renault, Luca de Meo, promet depuis des années de faire du constructeur français un «leader dans l’électrification», le voici qui semble vouloir moduler son approche. Dans une interview aux Echos publiée ce lundi 22 juillet, il estime que l’objectif européen d’interdire complètement la vente de voitures thermiques neuves à l’horizon 2035 sera «compliqué» à tenir. Avant d’ajouter : «Nous avons besoin d’un peu plus de souplesse dans le calendrier.»

Arrivé en juillet 2020 aux commandes de l’entreprise, le chef d’entreprise explique ainsi que «basculer en douze ans de 10 % de parts de marché pour les véhicules électriques à 100 %, c’est vraiment très compliqué». Selon lui, «nous ne sommes pas encore sur la bonne trajectoire pour arriver à 100 % de voitures 100 % électriques en 2035.»

A l’entendre, sa demande de «souplesse» calendaire se justifierait par un rejet originel dans le choix de cette date, définitivement négociée entre les Etats membres de l’UE en octobre 2022 et formellement adoptée en mars 2023. «La position de la France et celle de Renault Group ont été plutôt de dire que 2035 c’était trop tôt et qu’il fallait plutôt viser 2040.»

Toutefois, il nuance : «Pour autant, il ne faut pas instrumentaliser le ralentissement actuel du marché pour abandonner purement et simplement l’objectif. Ce serait une grave erreur stratégique.» Il martèle également que «l’électrification dans l’automobile fait partie du progrès», que «nous ne devons pas refuser le progrès», et rappelle que l’industrie automobile a «investi des dizaines de milliards d’euros dans la transition» vers l’électrique et qu’il ne faut pas «les jeter par les fenêtres».

«Il faut que l’écosystème avance ensemble»

«La question c’est celle du rythme», martèle Luca de Meo, qui met en avant le fait que «la majorité des pays n’ont pour l’instant pas dépassé les 7 % de parts de marché dans l’électrique à ce jour». Ainsi, en mars 2023, l’Allemagne avait rétropédalé sur ses ambitions concernant les moteurs thermiques. En avril 2024, la Cour des comptes européenne avait même estimé que l’Europe n’était pas prête, dénonçant «l’absence d’une feuille de route précise et stable» dans le développement des carburants alternatifs.

Pour le chef du constructeur automobile, «il faut que l’écosystème avance ensemble, tous ensemble», afin d’éviter les impairs. «C’est de cela dont je parle quand je demande de la souplesse et de l’agilité». Par ailleurs, à son sens, «la voiture électrique n’est qu’une des solutions» pour décarboner le secteur automobile. Il serait ainsi «plus judicieux d’accélérer en même temps la rénovation du parc» et de «regarder ce que l’on peut faire du côté des types de carburants». Et de conclure : «Dans les dix prochaines années, il n’y a pas suffisamment de voitures électriques pour vraiment impacter la décarbonisation. […] A la roulette, on ne peut pas miser tout sur une couleur».

En février, le «DG» de Renault avait déjà estimé qu’un retour en arrière sur l’interdiction des voitures essence et diesel en 2035 serait bienvenu mais compliqué. Fin mai, lors de la dernière édition du salon de l’automobile de Genève, il avait déclaré espérer «que l’interdiction s’appliquera un peu plus tard, parce que je pense que nous ne serons pas capables de la faire sans endommager toute l’industrie et toute la chaîne de valeur de l’automobile européenne».