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Libération
Offre de reprise

Le milliardaire d’extrême droite Pierre-Edouard Stérin souhaite acquérir l’équipementier automobile GMD, en grande difficulté

Le sous-traitant automobile est en négociations pour être repris par la holding Otium Capital de l’homme d’affaires proche des milieux d’extrême droite Pierre-Edouard Stérin. GMD souffre de la baisse de la production automobile française et croule sous plus de 350 millions d’euros de dettes.
Pierre-Edouard Sterin, cofondateur et principal actionnaire du groupe Smartbox et créateur de Otium capital, le 6 septembre 2023. (Stéphane Lagoutte/REA)
publié le 22 octobre 2024 à 12h59
(mis à jour le 22 octobre 2024 à 15h49)

Pierre-Edouard Stérin, le milliardaire en croisade contre «la gauche mélenchonisée», va-t-il porter secours à l’équipementier automobile français GMD ? Selon nos informations, confirmant celles des Echos et de Franceinfo, la holding Otium Capital, détenu par l’homme d’affaires d’extrême droite, souhaite reprendre cette entreprise en proie à de grandes difficultés financières à travers sa société d’investissement Montyon Capital. Une réunion avec les représentants du personnel de GMD est prévue ce mardi 22 octobre au ministère de l’Economie, selon un syndicaliste de l’entreprise et un échange de courriels avec Bercy consulté vendredi dernier par l’AFP. Contacté par Libération, GMD juge prématuré de répondre à nos sollicitations.

Ce groupe est un des plus gros équipementiers automobiles hexagonaux : fin 2023, il employait 5 259 salariés à travers le monde, dont 1 825 en France, et présentait près d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires. Il fabrique notamment de grosses pièces en aluminium comme des pièces d’habillage en plastique pour l’intérieur des véhicules, pour des constructeurs comme Stellantis, Renault ou Porsche. Outre la France, avec des sites à Grandvilliers (Oise), Châteauroux (Indre) ou Valenciennes (Nord), l’équipementier possède notamment de grandes usines au Maroc, en Slovaquie ou au Portugal.

Mais ce poids lourd français, fondé en 1987, est à présent criblé de dettes à hauteur de 350 à 400 millions d’euros. Conséquence, entre autres, des délocalisations de ses clients et du ralentissement du marché automobile en Europe. Montyon Capital voudrait en effacer 80 % avec plusieurs dizaines de millions d’euros de fonds propres à Pierre-Edouard Stérin. Les négociations sont toujours en cours mais seraient sur la bonne voie. D’après les Echos, la moitié de l’endettement aurait été constituée d’un prêt garanti par l’Etat (PGE) accordé lors de la crise du Covid. Cette reprise devrait s’accompagner de la sortie du capital du fondateur de l’entreprise, Alain Martineau. L’entreprise serait rentable sur le plan opérationnel et Montyon Capital souhaite la consolider en la restructurant. Notamment en accroissant ses capacités au Maroc, au Portugal, au Mexique, en Hongrie et en République tchèque et en diminuant en parallèle le chiffre d’affaires réalisé en France de 45 % à un tiers.

Un milliardaire ambitieux et controversé

Par cette acquisition, Pierre-Edouard Stérin continue d’agrandir et de diversifier son empire. Classé 94e fortune de France avec 1,4 milliard d’euros par Challenges, l’homme d’affaires s’est enrichi en fondant Smartbox au début des années 2000. Depuis une vingtaine d’années, il a multiplié les investissements en tout genre comme dans la restauration (la Pataterie), la beauté (Oh My Cream), la santé (Carmat)… Plus récemment, c’est du côté des médias qu’il a jeté son dévolu. Pierre-Edouard Stérin avait tenté en vain de mettre la main sur l’hebdomadaire souverainiste Marianne. Il a également financé Neo, une sorte de «Brut rural», la chaîne YouTube de débats ultra-polarisés le Crayon et acquit l’agence d’influenceurs Marmeladz.

Mais cet entrepreneur discret est récemment sorti du bois lors d’un entretien accordé au FigaroVox mi-juillet où il affirme «mener une bataille culturelle féconde» contre la fabrication de «cerveaux de gauche». Pierre-Edouard Stérin peut être décrit comme un homme libertarien, conservateur, catholique et d’extrême droite. Il vise à financer et à porter au pouvoir une alliance de la droite libérale et de l’extrême droite dans les dix prochaines années.

Une ambition qui repose sur son projet «Périclès». Le journal l’Humanité a pu se procurer un document confidentiel où l’on lit par exemple : «Pour servir et sauver la France, nous voulons permettre la victoire idéologique, électorale et politique» en défendant certaines valeurs comme «la famille, base de la société», la «place particulière du christianisme» ou «la préférence nationale». Un plan politique et économique établit à l’automne 2023 et qui s’étale jusqu’en 2032 avec 150 millions d’euros d’investissements prévus.

Mise à jour à 14h30, avec la réaction de GMD.