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Libération
Interview

Nouvelle politique de la RATP pour les malaises voyageurs : le protocole d’intervention «était complètement obsolète»

La présidente de l’Ile-de-France, Valérie Pécresse, a annoncé un changement de la «doctrine» d’intervention dans le métro afin d’éviter de longues interruptions de trafic. Pour Patrick Pelloux, porte-parole des médecins urgentistes de France, cela permettra de faciliter l’intervention des secours.
La régie des transports parisiens s'inspire du protocole en vigueur à Londres ou Tokyo, ou encore dans les métros de Lyon et de Lille. (Eric Beracassat/Hans Lucas)
publié le 29 février 2024 à 8h26

Exit l’arrêt du métro en plein milieu d’un tunnel pour attendre l’arrivée des secours, la prise en charge se fera bientôt sur le quai. La présidente LR de l’Ile-de-France et gestionnaire des transports dans la région, Valérie Pécresse, a annoncé mardi 27 février un changement de protocole en cas de «malaise voyageur» dans le métro parisien. Pour Patrick Pelloux, porte-parole des médecins urgentistes de France et professionnel qui fait partie de ceux qui ont proposé cette nouvelle organisation à la RAPT, il s’agit d’une mesure positive.

D’où vient cette modification du protocole prise en charge des personnes faisant des malaises dans le métro parisien ?

Contrairement à ce que beaucoup ont dit, ce n’est pas une décision d’Ile-de-France Mobilités en amont des Jeux olympiques et encore moins de Valérie Pécresse. Tout part d’une proposition du Samu et des sapeurs-pompiers de Paris formulée à la RATP dans le courant de l’année 2023, pour remplacer l’ancien protocole de prise en charge dans le métro. Il datait de 2007 et était complètement obsolète. Dès qu’il y avait un malaise, il fallait arrêter le métro, donc toute la ligne. Cela pénalisait tout le monde, y compris les agents de la RATP qui devaient expliquer aux gens mécontents pourquoi leur train était bloqué pendant des plombes. Et parfois des incidents tellement longs obligeaient les usagers à descendre sur les voies. En juin, ça a été un merdier du diable. Les gens marchaient à côté des rails électrifiés, c’était hyperdangereux.

Pour les secouristes c’était aussi très compliqué d’intervenir. Les sapeurs-pompiers de Paris ou le Samu marchaient dans le tunnel du métro pour rentrer dans la rame, exfiltrer la personne, la ramener en sécurité et intervenir. On perdait un temps fou. Donc on a fait un truc simple, on a dit à la RATP : «Vous n’arrêtez plus les trains.»

Concrètement, si un voyageur fait un malaise dans le métro maintenant, comment se passe sa prise en charge ?

Le conducteur du métro ou le RER s’arrête à la station suivante. Là, soit la personne qui ne sent pas bien peut sortir toute seule sur le quai, soit elle est aidée par les voyageurs. Elle rejoint alors un agent de la RATP et dans les dix minutes, le Samu ou les pompiers interviennent. Par contre, si la personne est totalement invalide, le métro restera à quai.

Une fois sur les quais, la personne ne risque-t-elle pas de se retrouve seule ?

Il y a plein de pompiers ou de secouristes qui prennent le métro. Avec les programmes de premiers secours, on a quand même augmenté le nombre de gens qui peuvent manœuvrer quelqu’un qui fait un malaise. Et, non, elle ne reste pas seule sur les quais : il y a toujours des agents de la RATP. C’est l’avantage de la RATP, il y a des agents à chaque station.

Les syndicats de la profession, pour certains opposés à ce nouveau protocole, rappellent qu’ils ne sont pas secouristes…

Ce n’est pas ce qu’on leur demande. On leur demande juste de sortir les gens ou d’aider les gens à sortir. Il faut démystifier le discours sur les premiers secours. C’est toujours mieux de placer quelqu’un qui ne se sent pas bien sur le quai, plutôt que de le laisser dans le wagon où il est compressé.

Quant à la responsabilité judiciaire, il faut savoir qu’à partir du moment où l’alerte est donnée et que vous portez secours, la notion de mise en péril de la vie d’autrui n’est jamais retenue. On n’a jamais reproché à des secouristes le fait qu’ils n’aient pas réussi à réanimer quelqu’un, c’est ce qui permet aux gens de porter secours. Sur le secours à la RATP, il n’y aura jamais d’instruction judiciaire portée sur les personnels.

Dans son annonce, Valérie Pécresse a laissé entendre que ce protocole était inspiré de ceux mis en place dans des métropoles comme Londres ou Tokyo. Cela fonctionne dans ces villes ?

On a surtout répliqué le fonctionnement qu’on a adopté avec les TGV. On n’arrête plus les trains en rase campagne mais dans les gares, et cela fait gagner énormément de temps aux malades et aux secours. Et pas besoin d’aller à Londres ou Tokyo, ce protocole est appliqué pour le métro de Lyon ou le métro de Lille. On a interrogé les collègues et ça fonctionne très bien. Valérie Pécresse essaie de récupérer ces mesures parce qu’elles fonctionnent.