2023 a été faste pour Renault : le constructeur automobile français est redevenu bénéficiaire, avec un bénéfice net de 2,2 milliards d’euros, contre une perte de 354 millions en 2022, année plombée par sa sortie de Russie. Mieux encore, sa marge opérationnelle (ratio entre le résultat d’exploitation et le chiffre d’affaires) a atteint un record, à 7,9 %. Ses ventes ont bondi de 13 %, avec un chiffre d’affaires de 52,4 milliards d’euros, grâce à la fois au succès des modèles économiques Dacia, mais aussi à une hausse de ses prix et aux modèles haut de gamme. Ce dont la direction s’est réjouie : «C’est un jour de grande fierté, avec des résultats historiques pour notre groupe», selon le directeur financier Thierry Piéton. La marque au losange lancera une dizaine de modèles cette année.
Renault va donc bien mieux, après quatre années consécutives de baisse de ses ventes, après la pénurie de semi-conducteurs lors de la crise du Covid, sans parler de l’affaire Ghosn, qui a secoué son alliance avec Nissan et Mitsubishi. Le français se hisse à la troisième place en Europe, avec un volume de ventes en hausse de 9 % l’an dernier.
Ces bonnes nouvelles masquent cependant la menace qui plane sur tous les constructeurs européens, à la merci d’un marché poussif, de bonus gouvernementaux en baisse et surtout des hyperactifs concurrents chinois, qui augmentent leur production et cassent les prix dans le secteur clé de la voiture électrique.
Le marché 2024 s’annonce en «très légère croissance» mais ne retrouvera pas ses niveaux d’avant-Covid, a averti la Plateforme automobile (PFA), qui rassemble toute la filière française, constructeurs et équipementiers. En France, le marché des voitures neuves est bien remonté, à près de 1,8 million de véhicules vendus en 2023, mais il reste très en dessous de la moyenne des années précédentes, et le second semestre pourrait ralentir. Surtout, le secteur le plus disputé sera celui des voitures électriques : Renault a prévu de nouveaux modèles, mais les volumes seront-ils au rendez-vous ? «Vu l’investissement des industriels dans l’électrique, il y a une inquiétude sur les volumes qui ne sont pas là comme attendu», selon la PFA.
Carlos Tavares, le directeur général de Stellantis, a même déclaré début février que «la Chine risque de détruire l’industrie automobile européenne». Et a défendu l’idée d’une méga-fusion entre groupes européens, qui pourrait cibler Renault, trois fois plus petit que Stellantis. John Elkann, président de Stellantis, s’est empressé de démentir, mais en soulignant la fragilité de l’industrie européenne face aux marques chinoises et à une réglementation européenne de plus en plus ambitieuse pour la décarbonation.