Un tarif avantageux… à quelques exceptions près. Avec sa réforme tarifaire du réseau de transport francilien (métro, RER, tramways, bus), annoncée mardi 17 septembre, la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse veut simplifier la vie des quatre millions d’usagers non-détenteurs d’un pass Navigo. A partir du 2 janvier 2025, il n’existera plus que deux types de tickets : celui dévolu au métro et au RER, à 2,50 euros, et celui pour emprunter le bus et le tramway, à 2 euros. Ces deux nouveaux tickets s’appliquent sur l’ensemble de la région, qu’importe la distance parcourue. Si l’immense majorité des Franciliens gagnent au change, ce n’est pas le cas de tout le monde. Libération fait le point.
Les perdants
Les voyageurs occasionnels, dans Paris et proche banlieue
Annoncé en grande pompe, ce tarif unique n’en demeure pas moins une augmentation du prix du ticket T+ aujourd’hui à 2,15 euros, qui va disparaître au profit du pass Navigo Easy. Un Parisien non-détenteur du Navigo (mensuel ou annuel) et qui voudrait prendre le métro pour se déplacer intra-muros déboursera donc 35 centimes de plus. Plus encore s’il avait l’habitude de se procurer des carnets de dix trajets, à 1,73 euro le ticket. «Cela équivaut à une hausse de 15 % pour le ticket de métro, ce n’est pas rien», remarque Marc Pélissier, président de l’Association des usagers des transports d’Ile-de-France. Selon les chiffres d’Ile-de-France Mobilités, un million d’utilisateurs occasionnels ne prennent que le métro. Tous seraient donc pénalisés.
La baisse du prix du ticket de bus et tramway de 15 centimes ne va pas non plus «dans le sens d’une simplification», selon lui. «On a désormais deux tarifs différents, là où il n’y en avait qu’un seul avec le ticket T+. Concrètement, les voyageurs occasionnels devront faire des stocks de tickets de bus tramway et de métro-RER sur leur passe Navigo Easy.» Fini les tickets en carton que l’on pouvait insérer n’importe où, il faudra désormais prévoir et connaître son trajet à l’avance.
Mais cette problématique peut rapidement se résoudre grâce au Navigo Liberté+. Ce pass, réservé aux habitants et travailleurs franciliens, offre une réduction de 20 % sur les tickets, soit 1,99 euro pour le métro et le RER et 1,60 euro pour les bus et trams (contre 1,73 euro à l’heure actuelle). Mieux encore, il inclut, grande nouveauté, les correspondances entre tous ces modes de transport. Accessible jusqu’à présent uniquement dans Paris, il sera étendu à toute l’Ile-de-France avec la réforme. «Il faut que tous les Franciliens passent au Navigo Liberté +, défend Arnaud Bertrand, président de l’association Plus de Trains. Ils pourront prendre tous les transports qu’ils veulent, sans se poser de questions.»
Les touristes
Contrairement aux Parisiens, les touristes ne peuvent pas souscrire au Navigo Liberté+ et devront donc se contenter du pass Navigo Easy… Ce sont donc eux qui risquent le plus de grincer des dents. «Passer de 1,73 à 2,50 euros, ça peut paraître énorme, mais cela reste raisonnable en comparaison de New York, Londres ou encore Berlin, nuance Arnaud Bertrand. D’une certaine manière, ce n’est pas illogique de faire payer plus cher ceux qui sont de passage à Paris, plutôt que ses habitants et usagers quotidiens.»
Sauf que les amoureux de la capitale devront faire face à une autre augmentation : celle du «Paris Visite», sorte de pass Navigo illimité, avec accès aux aéroports, mais bien plus cher. Le ticket pour une journée, aujourd’hui à 13,95 euros pour les zones 1 à 3, et 29,25 pour les zones 1 à 5, va passer à 29,90 euros. «On regrette malgré tout que n’ait pas été retenue l’option de validation par carte bancaire, comme cela se fait dans de nombreuses villes», nuance Marc Pélissier, qui trouve également que faire payer plus cher les touristes «ça peut se défendre».
Les occasionnels qui veulent aller à l’aéroport
Que ce soit pour le Navigo Easy ou Liberté+, pour rejoindre l’aéroport, la réforme met tout le monde dans le même panier. Elle propose désormais un tarif unique de 13 euros pour rejoindre n’importe quel aéroport, ou pour se rendre en Ile-de-France et à Paris en sortant de l’avion. Actuellement, le prix varie en fonction du terminal et du mode de transport choisi, entre 10,30 et 16,60 euros. Si Arnaud Bertrand trouve justifié «de faire payer plus cher le trajet pour prendre l’avion», il pointe du doigt certains cas particuliers problématiques. «On a signalé le fait que certains Franciliens allaient payer 26 euros aller-retour pour passer un entretien d’embauche ou prendre le TGV [à la gare de Roissy Charles-de-Gaulle, ndlr]», développe-t-il. Mais difficile d’imaginer une adaptation du tarif aux motivations du voyageur…
Les gagnants
Les voyageurs occasionnels de petite et grande couronne
Prenons l’exemple de Baptiste, un Francilien vivant à Argenteuil. Il ne possède pas de Navigo, ni de Navigo Liberté+, car il ne prend que très rarement les transports en commun et a préféré opter pour le Navigo Easy. Exceptionnellement, ce mercredi 18 septembre, Baptiste doit se rendre dans le XIIIe arrondissement de Paris. Il n’habite pas tout à fait à la gare d’Argenteuil, et doit d’abord emprunter un bus, qui lui coûte 2,15 €. Puis la ligne J, pour rejoindre la gare Saint-Lazare, pour 4,15 €. Et enfin, la ligne de métro 14 jusqu’à Olympiades, gratuite grâce à la correspondance comprise dans son précédent ticket. Il débourse donc 6,30 € pour ce trajet. Au 2 janvier 2025, grâce à la nouvelle réforme, il ne paiera plus que 4,50 euros avec son passe Navigo Easy, ou 1,99 euro s’il se décide à souscrire au Navigo Liberté+.
Selon Valérie Pécresse, trois millions d’usagers seraient dans la situation de Baptiste, et donc gagnants de la réforme. «Elle nous a vraiment surpris positivement, se réjouit Arnaud Bertrand. C’est moins cher pour les usagers de banlieue et beaucoup plus simple pour tout le monde». «L’énorme avantage, c’est que plus personne ne se fera piéger par des tarifs compliqués», ajoute le défenseur des usagers franciliens, qui donne souvent l’exemple du Stade de France ou de la Défense, dont le prix du trajet dépend du mode de transport emprunté (3,20 euros en RER depuis Paris, 2,15 euros en métro). Un non-sens enfin réglé.