Le bruit courait depuis plusieurs jours. Les trains de nuit reliant Paris à Vienne, capitale de l’Autriche et Paris à Berlin, capitale de l’Allemagne, vont à nouveau disparaître en fin d’année. La compagnie ferroviaire autrichienne ÖBB a annoncé la fin de ces deux liaisons ce lundi 29 septembre, malgré la mobilisation des usagers pour leur maintien. Les trains ne circuleront plus dès le 14 décembre.
SNCF
Tombées en désuétude durant la décennie 2010 puis relancés en 2021 et 2023 en grande pompe, ces liaisons devaient être le symbole de la renaissance des trains de nuit en Europe.
La faute à l’Etat français, qui retire cette année à la SNCF une subvention essentielle au financement de ces «Nightjets». Elle oscillait entre 5 et 10 millions d’euros par an. «La SNCF a été informée par le ministère des Transports que les commandes publiques pour l’exploitation des trains de nuit Vienne-Paris et Berlin-Paris seraient arrêtées pour l’année 2026», a acté la compagnie autrichienne, qui déplore : «Les deux liaisons de trains de nuit ne pourront plus être proposées à partir du 14 décembre 2025.»
Lignes déficitaires
Les lignes se trouvent être déficitaires – comme le sont par ailleurs les autres trains de nuit, les Intercités ou les TER. Pourtant, elles connaissaient un certain succès, avec un taux d’occupation de 70 % en moyenne sur 2024 selon la SNCF. Mais elles ne sont pas «viables économiquement sans subvention de l’Etat», a avancé la compagnie dans un communiqué lundi. «L’exploitation des trains de nuit est en effet un énorme défi économique», avance-t-elle.
D’abord, les recettes sont limitées : contrairement au siège d’une ligne de jour qui peut être occupée par quatre passagers différents en une journée, une place dans un train de nuit n’est occupée que par un seul passager par jour, explique la SNCF. S’ajoute un coût du personnel plus élevé car il y a «besoin de plus de personnel de service» et «plus de personnel de bord en raison du passage des frontières», où il est également nécessaire de changer de locomotive et d’équipage.
Selon le collectif d’usagers «Oui au train de nuit», qui alertait dès la semaine dernière sur l’avenir de ces lignes de nuit, le gouvernement français a décidé de plus verser à la SNCF sa subvention car les opérateurs n’auraient pas respecté «leur promesse de créer une desserte quotidienne», le train ne circulant que trois jours par semaine.
Reportage
«Cette décision s’inscrivait dans le cadre de la préparation du budget souhaité par François Bayrou (objectif de -44 milliards d’euros), confirme le ministère français des Transports. Le cadrage transports a contraint le ministère à faire des choix budgétaires difficiles. Le budget des transports étant déjà très contraint, la priorité a été donnée au maintien des lignes intérieures nationales. Les travaux se poursuivent dans le cadre du projet de budget à venir.»
Pour la SNCF, «le passage en circulations quotidiennes à compter de 2026, comme c’était l’objectif initial, n’était plus envisageable compte tenu des travaux très importants sur le réseau en France et en Allemagne», se justifie-t-elle. La ligne Paris-Berlin avait notamment été suspendue pendant plus de deux mois l’été 2024, quelque mois après son lancement, en raison de travaux nécessaires sur plusieurs tronçons du parcours.
Huit lignes de nuit en France
En 2022, Emmanuel Macron avait promis «une dizaine» de lignes de train de nuit d’ici à 2030, alors que celles-ci avaient quasiment disparu en France pendant les années 2010. Ces lignes étaient souvent vues comme une alternative pour voyager sur de longue distance à l’avion, plus polluant et contraignant.
Décryptage
Depuis la relance du Paris-Nice en 2021, huit lignes à l’intérieur des frontières sont opérationnelles, toutes au départ de Paris. Elles desservent notamment Tarbes, Toulouse ou encore Aurillac. Malgré leur bonne fréquentation, toutes ces lignes de nuit «reposent sur une subvention de l’Etat», assure la SNCF.
Les habitués de la ligne de nuit Paris-Berlin pourront toujours rejoindre la capitale allemande depuis Paris en huit heures grâce à une ligne à grande vitesse inaugurée fin 2024. La compagnie ÖBB, pionnière dans les trains de nuit, a précisé qu’elle maintenait la liaison Vienne-Bruxelles et continuerait d’investir avec «davantage de capacité et de confort sur les lignes existantes».
Mise à jour à 15 heures avec davantage de contexte.