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Libération
Economie de la guerre

Ukraine : les entreprises de défense européennes s’envolent en Bourse en prévision de l’effort de réarmement

Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
A l’ouverture des échanges sur le continent ce lundi 3 mars au matin, les actions de Dassault Aviation et Thalès flambaient de près de 15 %. Idem pour le Britannique BAE Systems, l’Allemand Thyssenkrupp ou encore le Suédois Saab.
Un blindé fabriqué notamment par Thalès, présenté à Villepinte (Seine-Saint-Denis) le 21 juin 2024. (ARTUR WIDAK/NurPhoto via AFP)
publié le 3 mars 2025 à 12h22

Quand la diplomatie fait grise mine, c’est le secteur de l’armement qui resplendit. Les entreprises de défense flambent ce lundi 3 mars au matin dans les premiers échanges sur les Bourses européennes, portés par la perspective d’une augmentation des dépenses militaires sur le continent dans un contexte de tensions avec les Etats-Unis sur l’Ukraine. Thales s’envolait de 14,38 % et Dassault Aviation de 14,85 % à Paris. À Londres, BAE Systems gagnait 17,31 %. À Francfort, Rheinmetall prenait 14,31 %, Hensoldt 18,82 % et Thyssenkrupp, qui possède une filiale spécialisée dans les sous-marins, de 10,68 %. Le constructeur aéronautique Saab, à Stockholm, s’octroyait 13,97 % et Leonardo, à Milan, 9,98 %.

«Le plan européen de soutien à l’Ukraine dynamise les marchés, avec une forte hausse des actions de la défense. La crainte d’un retrait américain s’accentue, contraignant l’Europe à en faire plus. L’armement devient un secteur clé pour les investisseurs», commente Jochen Stanzl, analyste chez CMC Markets.

Les alliés européens de Kyiv ont resserré les rangs dimanche à Londres et affiché leur engagement à soutenir Kiev et à se réarmer face à la Russie, après sa vive altercation entre Volodymyr Zelensky et Donald Trump à la Maison Blanche vendredi. Le Premier ministre britannique Keir Starmer a appelé à former «une coalition des bonnes volontés», pour défendre un futur accord de paix. «L’Europe doit faire le gros du travail», a-t-il martelé. Emmanuel Macron estime que les Européens doivent porter leur effort de défense autour de 3 à 3,5 % de leur Produit intérieur brut (PIB) contre 2 % aujourd’hui afin de répondre au désengagement américain en Europe. «Depuis trois ans, les Russes dépensent 10 % de leur PIB dans la défense. On doit donc préparer la suite», a-t-il estimé dimanche soir.

De son côté, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a dit vouloir présenter «un plan global sur la manière de réarmer l’Europe» lors d’un sommet spécial de l’UE prévu jeudi à Bruxelles. «Nous devons urgemment réarmer l’Europe», a-t-elle martelé. «Davantage de pays européens vont augmenter leurs dépenses de défense», a anticipé Mark Rutte, secrétaire général de l’Otan.

«Un tournant historique»

En Allemagne, les conservateurs de la CDU /CSU et les sociaux-démocrates du SPD, en pleine négociation pour former un gouvernement, discutent de la création de deux fonds pour la défense et les infrastructures, totalisant environ 800 à 900 milliards d’euros, selon des informations de presse dimanche non démenties. «Même étalée sur dix ans, cette somme équivaudrait aux investissements réalisés en Allemagne de l’Est depuis la réunification, marquant un tournant historique», dont profiteront les entreprises de la défense, selon une note de Deutsche Bank.

Mais ces plans d’investissement militaires n’ont pas que des effets positifs sur l’économie. «Sur le plan budgétaire, l’augmentation des dépenses signifie également une augmentation des emprunts, ce qui pourrait faire grimper les rendements européens», estime Ipek Ozkardeskaya, analyste pour Swissquote Bank. C’est dans ce contexte que, vendredi soir, la puissante agence de notation Standards & Poor’s a pointé des finances publiques françaises «sous pression». S & P a laissé inchangée la note de la dette française, mais elle l’a assortie d’une perspective négative, ce qui signifie qu’une dégradation est désormais possible. Selon Standards & Poor’s, «la stratégie budgétaire au-delà de 2025 reste incertaine» pour l’Hexagone.