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Effets de bord

Une canicule potentiellement coûteuse pour la croissance française

Dans une étude du mardi 1er juillet, l’assureur Allianz Trade estime que les récentes vagues de chaleur pourraient faire baisser de 0,5 point la croissance du produit intérieur brut européen, et de 0,3 point en France.
A Toulouse le 1er juillet 2025. (Ed Jones/AFP)
publié le 2 juillet 2025 à 16h17

La croissance économique risque de décroître à mesure que le thermomètre grimpe. Alors que l’Europe fait face à une importante période de canicule, ces vagues de chaleurs «ont des effets négatifs directs importants, non seulement pour les populations et la faune, mais aussi pour l’économie», avance une étude Allianz Trade du 1er juillet que Libération a pu consulter. Selon ses projections, les récentes vagues de chaleur pourraient amputer de 0,5 point la croissance du produit intérieur brut (PIB) européen. La France, elle, pourrait perdre jusqu’à un tiers de point de croissance de son PIB en 2025, un peu moins de la moitié de la croissance (+ 0,7) espérée par le gouvernement.

Pour faire ces calculs, l’assureur s’appuie notamment sur le nombre de jours où la température constatée ou prévue a dépassé les 32 °C dans chaque pays étudié entre le 1er mai et le 14 juillet. Plus concernées que les autres, la Chine, l’Espagne, l’Italie et la Grèce «pourraient perdre près d’un point de PIB chacune en raison de la vague de chaleur actuelle», détaille Allianz Trade. «Les Etats-Unis et la Roumanie pourraient être confrontés à une baisse d’environ 0,6 point chacun», dit l’étude selon laquelle au niveau mondial aussi, la croissance du PIB serait amputée de 0,6 point. L’impact sur l’Allemagne est lui moins important, avec une baisse de 0,1 point.

Effet trompe-l’œil

L’accroissement de la fréquence et l’intensité des fortes chaleurs entraînent notamment des «pertes matérielles importantes dans les pays développés et des pertes humaines dans les pays en développement», alerte l’assureur. En revanche, s’il y a des pertes macroéconomiques indirectes pour les économies développées, elles sont plutôt faibles car ces pays restent souvent à même de compenser «la perte de production par une augmentation de production ailleurs».

L’étude met aussi en garde sur l’effet trompe-l’œil de «destruction productive», qui peut donner l’impression que les catastrophes naturelles liées aux fortes chaleurs ont un «impact positif sur la croissance économique». Cette impression peut apparaître lorsque s’engagent des transferts monétaires pour pallier les dommages, surtout dans les pays en développement. Mais cet effet de croissance n’est que temporaire.

Réduction de la productivité au travail

Allianz Trade rappelle également que ces évènements réduisent la productivité au travail. «Une journée de chaleur extrême (supérieure à 32 °C) équivaut à une demi-journée de grève», selon l’assureur. Le facteur déterminant des pertes de productivité est donc le nombre de jours où la température est supérieure à cette température. Et lorsque «les températures grimpent à 38 °C, la baisse de productivité est encore plus spectaculaire, chutant de deux tiers».

Plus largement, d’ici à 2030, l’Organisation internationale du travail (OIT) prévoit que l’accroissement du stress thermique «réduira le nombre total d’heures de travail potentielles dans le monde de 2,2 %». C’est l’équivalent de 80 millions d’emplois à temps plein. Un pourcentage qui va dans le sens de l’analyse des économistes Josh Foster, James W Smallcombe et Simon Hodder, selon laquelle la capacité à effectuer un travail physique diminue presque de moitié en cas de fortes chaleurs. Allianz Trade cite un autre rapport paru en 2022 du Lancet Countdown, selon lequel en 2021, 470 milliards d’heures de travail potentielles ont été perdues, «soit une moyenne de 139 heures par personne».

S’adapter pour «préserver la productivité»

Face à l’ampleur des conséquences économiques à l’échelle mondiale, «à court terme, des mesures d’alerte et de prévention peuvent être mises en place. Mais celles-ci doivent être complétées par des mesures d’adaptation structurelle», explique l’assureur. L’étude évoque la nécessité d’accélérer le verdissement urbain, et une adaptation dite «productive» des lieux de travail, via l’adaptation des infrastructures ou encore des horaires d’activité en cas de fortes chaleurs. D’autant qu’à la suite de la formation d’un nouveau dôme de chaleur fin juillet, les températures devraient encore atteindre des sommets en Europe.