A gauche d'une vaste salle, deux cadres costumés inscrivent des chiffres sur un tableau. Des commerciaux s'activent au téléphone. A droite, changement de paysage: des ordinateurs désossés jonchent le sol, les écrans encombrent les bureaux. Des programmeurs, la tenue relâchée, triturent les claviers. C'est le choc de deux cultures: les cadres viennent d'un cabinet d'audit. Les programmeurs, eux, sont pour la plupart d'anciens bénévoles oeuvrant à la confection de logiciels libres. Aujourd'hui, tous sont salariés de la même entreprise.
Mandrake Soft est une start-up (jeune société boostée par le capital-risque) comme on en trouve des dizaines dans le «Silicon Sentier», ce quartier parisien prisé des entreprises high-tech. Son chiffre d'affaires est encore mince (1 million de francs en 1999). Après avoir empoché des dizaines de millions d'investisseurs, dont Axa et Viventures, elle prépare son introduction en Bourse. Elle compte parmi les cinq principales sociétés vendant des logiciels et des services aux entreprises basées sur la technologie Linux. Comme ses concurrents (les américains Red Hat et Caldera, l'allemand Suze"), elle tente une synthèse entre le développement d'une start-up lucrative et la participation à une communauté fondée sur le don et le partage.
Communauté. Lorsque Jacques Le Marois, le fondateur de Mandrake, recrute ceux qu'il appelle les «seniors», il leur met dans les mains la Cathédrale et le bazar (1), le texte-culte de la communauté Linu