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Libération
Interview

Koman on s'ekri sur le rézo.

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publié le 28 février 2001 à 23h12

Smileys, abréviations, points d'exclamation à gogo, «k» à la place du «qu», étirement des voyelles jusqu'à plus soif («yeeeeeees», quand on est très content), rébus, usage d'un anglais de kitchen, etc., autant de formes de langage qu'on voit sur le Net, dans les chats ou dans les mails. Existe-t-il de nouvelles formes de langage spécifiques à l'usage de ces formes de communication écrite? Un «métalangage» de ces communautés souvent très jeunes, créé ex nihilo pour les besoins du Web? Quelques éléments de réponse avec Jacques Anis (1), linguiste, professeur à Nanterre, spécialiste de l'écrit dans toutes ses spécificités et de la poésie visuelle (Mallarmé, Apollinaire), qui a commencé à se pencher sur ces nouvelles formes d'écriture avec le Minitel dès 1984 et a poursuivi avec le développement de l'Internet.

«Mdr mouaaaa é tu la;-)»: comment est-ce que vous interprétez ça?

Si vous me permettez ce matérialisme, toute forme linguistique est modelée par ses conditions de production et de réception: on n'écrit pas de la même manière, ni la même chose, sur une lettre ou sur une carte postale, idem sur un support informatique, où plusieurs peuvent écrire simultanément. Ce qu'on voit là, c'est de la «conversation écrite», où chaque marque graphique symbolise des parties de message qui passent autrement à l'oral, un regard, un sourcil levé, etc. On est dans la recherche d'expressivité, comme le montre la ponctuation: les points et les virgules sont marginalisés, mais le point d'interrog