Elles sont quatre. Quatre vieilles dames qui sont descendues du ferry «avec un coeur gros comme ça». Elles avancent doucement au milieu de ce musée qui sert de mémoire à l'Amérique des immigrants. Joan, Eleanor, Mary et Elizabeth disent «qu'elles veulent refaire le voyage de leurs ancêtres, pour tout apprendre de ceux qui sont partis vers l'inconnu et comprendre pourquoi ils ont quitté leur pays». En se tenant par la main, elles s'installent devant l'ordinateur et sortent des petits papiers jaunis du fond de leurs sacs. Sur celui d'Eleanor, un seul nom, celui de son grand-père, Pavel Duge. «Je ne sais pas grand-chose de lui, dit-elle doucement, simplement qu'il a quitté son village d'Europe de l'Est en 1903 ou 1904. C'est bête, mais mes parents ne m'ont jamais donné plus de précision. Et aujourd'hui, je veux savoir.»
Depuis une semaine, à Ellis Island, c'est comme si l'Amérique repartait à la découverte de ses origines. Plantée au sud de Manhattan, l'île est peut-être aujourd'hui le symbole le plus reconnu de ce Nouveau Monde qui a attiré, il y a plus d'un siècle, tous les candidats à l'aventure de la planète. C'est ici, en effet, dans cet immense bâtiment de briques rouges, rénové il y a une dizaine d'années, qu'ont atterri 22 millions d'immigrants entre 1892 et 1924. Et désormais, depuis le 17 avril exactement, l'histoire de chacun de ces immigrants est accessible sur banque de données informatique et sur le Web. Après plus de huit ans de laborieux travaux, la fondation Sta