Les fauteuils claquent dans la salle de la Cinémathèque française à Paris. Le film est commencé depuis à peine dix minutes. Les deux tiers des spectateurs filent déjà à l'anglaise, excédés par les images floues et mouvantes. C'est comme si la myopie leur était tombée dessus à l'extinction de la lumière. Le cinéma a habitué à des contours nets, à des images réalistes. Nocturnes pour le roi de Rome perturbe. Impossible de fixer le regard sans ciller. Le projecteur ne tressaute pas, la pellicule ne se voile pas. Tout vient de la manière de filmer de Jean-Charles Fitoussi : non pas en 35 mm mais avec un téléphone portable de troisième génération. La Jaguar de la technologie cellulaire restitue la réalité dans un halo de pixels, devenu un matériau pour le jeune réalisateur. Le narrateur, une voix off, est un vieux compositeur italien à la vue faiblarde invité à une réception en son honneur à Rome. Les défauts exploités donnent une belle ambiance picturale. Une heure et quinze minutes tournées uniquement au cellulaire, avec une vraie histoire, c'est une première mondiale.
Un autre candidat lui dispute cette primeur. Aryan Kaganof affûte la sortie de SMS Sugar Man. Là où Fitoussi a innové sans vraiment le vouloir, le Sud-Africain a bâti une machinerie médiatique qui a précédé depuis des mois la sortie de son film. Cet autre long métrage a été shooté avec huit mobiles sur onze jours. Les personnages principaux sont un souteneur (Sugar Man) et deux prostituées de corvée ce soir-là. Le