Un joueur, par principe, aime le risque et les paris. Prenons celui-ci : l'annonce par Sony, le 26 avril, que Ken Kutaragi quittait la direction de sa division jeux sera, à l'avenir, regardée comme une étape cruciale dans l'histoire de cette industrie. Kutaragi est le seul homme sur Terre à avoir conçu, développé et accompagné le lancement de quatre consoles de jeux (PS1, PS2, PSP et PS3). Il n'a pas seulement apporté sur un plateau le système PlayStation à Sony : il a offert à la compagnie l'accès à un business de plusieurs milliards de dollars dont elle est devenue le leader, permettant par contrecoup à l'industrie tout entière d'atteindre les dimensions inouïes que nous lui connaissons aujourd'hui. Voilà pour le legs intangible de Kutaragi-san avant cette démission qui ressemble fort à une mise au rancart, l'ex-homme fort obtenant en échange le mirifique placard doré de honorary chairman. Ce départ peu glorieux peut se lire comme la leçon conclusive d'une séquence qui dure depuis dix-huit mois et que Sony souhaiterait clore, un festival de maladresses dont le lancement de la PS3 aura formé le foireux bouquet.
Si la nouvelle est d'importance, c'est aussi en vertu de l'avenir qu'elle dessine pour la multinationale. D'un point de vue corporate, deux reproches majeurs sont adressés à Kutaragi : n'avoir pas su capitaliser sur l'avance acquise, entamée par la concurrence, et avoir agi en autarcie au sein de sa division, s'en remettant avec un peu trop de confiance