Le camarade Staline avait choisi d'installer ses juifs soviétiques le plus loin possible de Moscou, au fin fond de la Sibérie : le Birobidjan, région désertique et aride à la frontière de la Mongolie. Les juifs auraient donc leur propre Etat. C'était en 1934, avant l'extermination nazie, et avant la création d'Israël. L'écrivain Marek Halter, fasciné par cette «région autonome juive», faux symbole d'une émancipation d'un peuple mais l'un des derniers endroits au monde où l'on parle encore le yiddish, a franchi les 8 400 kilomètres de Moscou au Birobidjan pour voir, et filmer, ce qui reste de cette mystérieuse république. D'autant qu'il a construit son dernier roman autour de l'exotique Birobidjan (l'Inconnue du Birobidjan, Robert Laffont).
A la descente du Transsibérien, le nom de la gare est bien écrit en russe et en yiddish. Un chandelier à sept branches est planté très haut sur la place centrale, l'avenue principale de la ville s'appelle encore «Sholem-Aleichem», du nom du grand écrivain yiddish, la langue est enseignée dans les écoles et quelques pages du journal local sont en yiddish. Il reste quelques milliers de juifs dans ce Birobidjan où vivent maintenant environ 200 000 Russes. Joseph Staline voulait répartir les différentes «nationalités» sur des territoires ethniques. Il avait décidé de délocaliser le peuple juif en Sibérie, dans une