L’appétit de l’ogre numérique n’a pas de limite. Pour faire mieux, il doit manger plus. Pour pouvoir accomplir toutes les prouesses imaginées par les futurologues, notamment celles censées «simplifier» (les guillemets sont ici de mise) la vie des utilisateurs, il doit tout savoir de nous. Tout, même ce que nous ne savons pas nous-mêmes. Le cerveau de substitution, celui qui va rappeler un rendez-vous oublié au fin fond de la boîte mail, qui va se souvenir du trajet déjà effectué pour proposer de lui-même un itinéraire alternatif parce qu’il y a un embouteillage monstre, qui va rappeler le vin préféré de notre hôte, ce cerveau-là doit tout enregistrer. Tout le temps.
Lorsqu’on évoque les données personnelles et la vie privée, on pense d’abord à tout ce qui est formulable de manière explicite : nom, prénom, date de naissance, orientations sexuelle et politique, activités professionnelle et militante, relations familiales et amicales, informations bancaires, etc. Ces données déclaratives nous définissent, et nous ne voulons pas qu’elles tombent entre n’importe quelles mains. Mais ce ne sont que la partie émergée des informations que nous produisons. Le reste, c’est ce qu’on appelle les données comportementales. La géolocalisation en est un exemple. Ainsi, rien qu’en se déplaçant, un utilisateur de Google Now alimente les données de son compte, qu’il pourra consulter ensuite sur la page "historique des positions", mais qui serviront aussi à renseigner ses habitudes pour un ciblag