Libération, un «Flore du XXIe siècle» passé à la moulinette néocapitaliste ? Transformé en «un réseau social, créateur de contenus, monétisable» ? Ce journal, d'abord emblématique de la contestation sociale et sociétale post-soixante-huitarde, serait-il rattrapé par les années 80, quand Serge July lui donna une identité «libérale-libertaire», où le «libertaire» réduit à la «branchitude» culturelle s'alliait avec la logique néolibérale ?
Les journalistes de Libé se sont rappelé les paroles de leur principal parrain historique, familier du Flore d'avant l'esthétisation du fric «avec l'aide de Philippe Starck», Jean-Paul Sartre : «On a raison de se révolter !» D'autres sens, plus aiguisés, de «libéral» et «libertaire» pourraient servir à leur résistance.
«Libéral» au sens du libéralisme politique, celui de la liberté d’expression, du pluralisme des opinions et de l’indépendance de la presse face aux forces étatiques, mais aussi, aujourd’hui, marchandes. Libéralisme politique également d’un Montesquieu dans la perspective de la limitation réciproque des pouvoirs, y compris commerciaux.
«Libertaire», au sens anti-étatiste et anticapitaliste de Bakounine, comme dans la veine d’un Proudhon, avec la promotion de la coopération d’individualités autonomes et singulières.
Un journal ainsi «libéral» et «libertaire» pourrait mieux exprimer de manière indépendante et critique les différentes sensibilités de la gauche,