Les flonflons de Los Angeles se sont tus et l'on s'étonne une fois encore, dans le silence revenu, de l'extrême intensité de ce rituel cacophonique, concentré sur trois journées officielles et une officieuse, par lequel une industrie toute entière a choisi de sonner le gong de ses propres années. Il y a comme un décalage, une contradiction, entre la puissance désormais impériale de cette industrie, la plus lourde, et de loin, parmi celles des «loisirs culturels», et la fébrilité adolescente brouillonne qu'elle exprime lors de rassemblements comme celui de l'E3 (lire page précédente). C'est un domaine sur lequel elle semble ne pas vouloir prendre exemple sur le cinéma, qu'elle a tant vampirisé, ni même sur les grands salons du livre ou les festivals de musique. Il y a une nervosité exhibitionniste, un émoi éjaculatoire toujours trop pressé qui semblent spécifiques à cette industrie et que les salons au lieu de les apaiser, surexcitent.
Cela tient aussi à l’état du rapport de forces : les maîtres du jeu (vidéo) sont les éditeurs. Ils sont les organisateurs du salon de Los Angeles. Ils sont à la fois le centre de la manufacture du jeu et le centre de son commerce. Ils sont surtout les fabricants des images et des mots par lesquels la confuse, sinon l’obscure, sphère du jeu est portée à la connaissance du grand public : ce langage fumigène de la communication et