Ainsi donc la directrice de l'Ecole de journalisme de Sciences-Po, Agnès Chauveau, a été mise en congé pour une affaire de «plagiat». Arrêt sur images a révélé qu'elle avait copié-collé plusieurs articles de presse de Mediapart, du Monde ou de RFI pour ses chroniques sur France Culture, reprises sur le Huffington Post. Des passages descriptifs, pour la plupart insignifiants. Agnès Chauveau se fait rattraper par la patrouille, comme un cycliste qui aurait laissé traîner un peu d'EPO dans son sang, mais mon sentiment est que le reste de la caravane continue tranquillement à se doper.
Il faut se rendre à l'évidence : avec Internet, le plagiat est devenu banal. C'est un triste plagiat, de pure routine, un plagiat paresseux, par manque de temps et d'intérêt pour les sujets. Dans un journalisme web où tout se ressemble, le plagiat ne m'apparaît plus comme un crime digne d'apparaître dans les Tables de la loi du journalisme, la Charte de Munich : un journaliste digne de ce nom doit «s'interdire le plagiat» (règle 8). On devrait plutôt s'interdire de parler de «plagiat» dans des cas comme celui d'Agnès Chauveau, mot infamant qui stoppe tout débat et ne permet pas d'appréhender les pratiques ordinaires, presque inconscientes. Le jour où on a inventé le copié-collé, il aurait fallu inventer une haute autorité du plagiat, chargée d'en réguler les usages. Faute de quoi, le plagiat est devenu la norme sur Internet. Les textes y circulent comme les photos sur Google Image