Lorsqu'Hervé Trouillet, Nicolas Romain et Fabien Baboz, tous venus de l'animation, décident de se lancer ensemble dans une grande aventure transmédia, ils partent à la recherche d'un univers puissant et adulte qui n'a pas encore été adapté. Après avoir compilé chacun leurs dix jeux, films et bandes dessinées préférés, disséqué les différents styles et recoupé les différents univers, s'impose une œuvre unique et quasiment inadaptable : la Horde du Contrevent. Hervé Trouillet se démène alors et réussit - ce fut loin d'être évident - à convaincre son auteur, Alain Damasio.
Grosse artillerie. Commence alors le plus difficile : retranscrire en images et en mouvements ce vent que l'auteur a même été jusqu'à décrire précisément grâce à une ponctuation spécifique. Une équipe de 15 personnes se met donc à travailler sur un premier prototype pendant dix-huit mois dans un studio basé à Lyon. Mais le résultat ne convainc pas et les fondateurs décident de fermer cette première structure pour en monter une autre, plus légère, à Aix-en-Provence : Forge Animation. Et, pour avancer, pour convaincre, il leur faut un retour des joueurs intéressés par un tel projet. Ils décident alors de se lancer sur Kickstarter, le site qui a permis des success stories comme celles de Double Fine Adventure (3,3 millions de dollars récoltés) ou de Torment : Tide of Numenera (4,1 millions de dollars). Et l'accueil est, jusqu'ici, tiède. «Lancer un Kickstarter, c'est se mettre à nu, analyse Marianne Carpentier, productrice chez Forge, c'est violent. On aurait sans doute dû le faire avant, mais c'était angoissant. On avait peur de présenter quelque chose qui n'accroche pas.»
D u coup, ils sortent la grosse artillerie, notamment au niveau du casting des illustrateurs : George Hull, qui a travaillé avec les Wachowski, Oscar Chichoni (le Hobbit, Pacific Rim) ou encore Wayne D. Barlowe (Avatar, Harry Potter).
Mais la sauce a du mal à prendre. La somme demandée, 330 000 dollars canadiens (Forge a un bureau à Montréal), soit 233 000 euros, est pourtant raisonnable au regard du projet. «Cette somme, c'est pour sécuriser la fin du développement, précise Marianne Carpentier. Son budget est plus élevé.» Peut-être une autre piste pour le manque d'enthousiasme des internautes, qui apprécient avoir un impact plus important sur le destin d'un jeu.
Irréprochable. Il reste sept jours. Quoi qu'il arrive, le studio compte aller au bout de sa démarche, même si un échec sur Kickstarter risque, selon Marianne Carpentier, de «freiner un peu la production». Mais ils comptent beaucoup sur leur expérience dans l'animation et sur le talent des graphistes made in France pour proposer un jeu visuellement irréprochable, même en étant loin du budget d'une superproduction. L'objectif : sortir le film d'animation (un long métrage en salles) et le jeu en même temps, dans l'idéal début 2017. Ils savent que ce sera dur, mais ils comptent sur le vent pour les porter.