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Radio France : les «playlists de grève» plébiscitées

Radio France, la grève et après ?dossier
Au huitième jour de grève à Radio France, certains auditeurs commencent à réclamer des émissions, voire une antenne qui ne diffuserait que la musique proposée par le groupe public pour meubler.
Discothèque Centrale de Radio France située dans un entrepôt Porte d'Aubervilliers. (Photo Raphael Dautigny)
publié le 26 mars 2015 à 16h56
(mis à jour le 26 mars 2015 à 18h08)

Finira-t-on par préférer entendre Leonard Cohen plutôt que Patrick Cohen le matin sur France Inter? Au huitième jour de grève à Radio France, les playlists musicales des stations, proposées pour combler l'absence de programmes, sont en tout cas plus populaires que jamais, et semblent presque suffire à compenser, pour certains auditeurs, l'absence des programmes habituels. Ici, on demande carrément une station du groupe public exclusivement consacrée à leur diffusion; là, on réclame qu'à tout le moins une émission musicale soit confiée au programmateur de France Inter.

En fait de programmateurs, la première station de Radio France peut en fait compter sur cinq personnes: Muriel Perez, Jean-Baptiste Audibert, Jean Michel Montu, Thierry Dupin et Djubaka. Le directeur de la programmation musicale d'Inter, Didier Varrod, a tenu à leur rendre hommage dans un article opportun publié le 25 mars, au cœur de la grève, sur le site de la station. On y apprend que la playlist en question, renouvelée tous les quatre mois et détaillée ici jour par jour, est composée essentiellement en fonction de «la qualité du titre» et «sa pertinence dans l'actualité», dans le respect des «équilibres que ce soit en termes de langue, d'univers, ou de statut de l'artiste». Et d'ajouter: «Nous devons faire la part belle aux artistes émergents, qu'ils soient issus de labels indés ou de l'autoproduction.»

Une profession de foi qui ne peut manquer de rappeler que lors de la dernière rentrée de la radio publique, la programmation musicale de France Inter faisait l'objet d'un vif débat: contre une directrice, Laurence Bloch, qui expliquait qu'il fallait «de temps en temps, compte tenu du profil de nos auditeurs, qui ont 55 ans d'âge moyen, entendre les Rolling Stones ou Barbara», la productrice Laurence Pierre regrettait que cette nouvelle ligne «ne respecte pas les auditeurs, qui sont tout sauf des gens passéistes, qui sont avides de nouveautés».

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Entre ces deux camps, Didier Varrod, alors fraîchement nommé directeur de la programmation musicale d'Inter, tentait de ménager tout le monde et annonçait que les programmateurs allaient faire leur sauce: «Un standard, c'est un morceau que tout le monde reconnaît, une petite madeleine, mais je veux qu'on ait nos standards à nous. Michel Delpech, non, mais Alain Bashung, oui, c'est Inter. L'Eté indien de Joe Dassin non, mais Marie-Jeanne oui ! En ce moment, on constitue donc une liste de 500 chansons françaises et 1 000 internationales, qui doit être finalisée en janvier. Il faut cadrer, sinon on va finir avec le morceau qui fait plaisir, du Dalida ou du Johnny… Il faut que chaque morceau soit vraiment revendiqué.»

Résultat : au cours de la dernière semaine, on entendait aussi bien, sur France Inter, I'm Waiting For The Man du Velvet Underground que Différents, de Franck Monnet, ou Je ne sais pas, de Jacques Brel.

La playlist de France Info, elle, est également appréciée, mais commence à susciter quelque mécontentement. Il est vrai qu'elle est moins variée – il s'agit en fait d'un programme «de secours» d'une durée de huit heures, qui date d'avant l'arrivée de Laurent Guimier à la tête de la station (en mai dernier, donc), indique cette dernière. Et comme il tourne en boucle, les mêmes morceaux passent aux mêmes moments  – on a ainsi repéré que la très belle The Suburbs d'Arcade Fire passait le matin vers 8 heures.

Avec son audience plus confidentielle (environ 2 % d'audience cumulée), France Culture se fait moins remarquer. Mais elle a elle aussi sa playlist spéciale grève, composée par Olivier Helle, responsable de la couleur d'antenne de la chaîne. «C'est une playlist qui tourne sur huit heures, qui diffuse un enchaînement musical automatique. Le robot la fait démarrer à minuit, elle se termine à 8 heures, elle recommence de 8 heures à 16 heures, puis de 16 à 24 heures», a-t-il expliqué au site de France Culture, précisant que la direction lui laisse toute latitude. Un peu plus world music qu'Inter, France Culture propose entre autres du Rodrigo Amarante, avec Fall Asleep, mais aussi du Brigitte, avec Oh Charlie chéri, ou encore London de Benjamin Clementine.

Quant à France Bleu, un article du Huffington Post expliquait la semaine dernière que le réseau de locales de Radio France se sert essentiellement de sa sélection habituelle, donc beaucoup de variété française. Sur France Musique, sans surprise, la playlist alternative est composée essentiellement de musique classique.